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La Vaillante >>> Ère 4 - Page 9

  • Le Visage de la République s'avance sur les Champs-Élysées

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    Tract officiel de "La Manif pour Tous" du 24 mars prochain, Rect°

     

    La loi Taubira "mariage pour tous" a été votée à l'Assemblée Nationale le mardi 12 février à 329 voix pour, 229 voix contre et 10 abstentions. Seulement 100 voix d'écart. 

    En avril prochain le Sénat procédera au vote de cette même loi.

     

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    Dorénavant, les 700 milles voix (696 428), les voies de chacune des pétitions du CESE se rassemblent et forment le visage de notre démocratie menacée de dé-composition. Sursaut de Marianne, recomposition de son visage. Ces voies redonnent chair au visage de notre République en danger. Garant du Code Civil, le visage de la République s'avance sur les Champs-Élysées.

    Le million de manifestants du 13 janvier reviendra le 24 mars accompagné d'un autre million.

    Le Président de tous les français restera-t-il sourd et aveugle devant ce nouveau cri de la République ?

     

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    Tract officiel de "La Manif pour Tous" du 24 mars prochain, Vers°

     

  • Ce sont les hommes qui font l’institution : petite histoire du CESE

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    Près de 700 000 pétitions délivrées au CESE, le 26 février 2013, contre le projet de loi Taubira "Mariage pour tous"


    De 2004 à 2010, Jean-Paul Delevoye a été médiateur de la République. Organe administratif créé en 1973, cette institution a pour but de suppléer les carences des pouvoirs exécutif, législatif et judiciaire sans toutefois se substituer à eux et en leur laissant toujours le privilège du préalable. Sur le modèle de l’ombudsman scandinave, il s’agit d’installer une forte mais souple autorité morale capable d’apprécier les situations d’administrés s’estimant lésés par l’administration. Mais la réforme constitutionnelle de 2008 est venue signer l’aveu d’échec de cette institution morte de son manque d’audace et l’a remplacée par le poste de défenseur des droits, accordé à l’ancien maire de Toulouse Dominique Baudis.

    En 2010, Jean-Paul Delevoye rejoint le Conseil économique, social et environnemental en tant que Président. Le parcours semble logique. Comme l’ombudsman qui a vocation à jouer un rôle de contrepoids aux parlements et à l’action politique au quotidien pour rapprocher administrés et administration, le Conseil économique, social et environnemental, troisième assemblée de la République, se veut une martingale populaire supplémentaire. Les forces vives de la nation pour donner leur avis, plutôt que le député godillot, voilà de quoi raviver la flamme démocratique des plus sceptiques. Surtout lorsque le CESE peut-être saisi par le peuple lui-même.

    L’année 2013 aurait pu être celle de la consécration du CESE. Pour la première fois de son histoire, le Conseil était saisi par 700 000 citoyens pour « donner son avis sur le projet de loi ouvrant le mariage aux couples de personnes de même sexe et son contenu ». La symbolique était immense. Le CESE tenait là une occasion unique de chasser à tout jamais son image de comité Théodule. Mais Jean-Paul Delevoye aura joué petit. Le jour même du dépôt des pétitions, il sollicitait directement l’avis du Premier ministre par courrier  en ces termes : « Dans la perspective du prochain bureau du CESE fixé au 26 février 2013, je me permets d’appeler votre attention sur les questions liées à la recevabilité de cette pétition ». Trois jours plus tard, le secrétaire général du gouvernement adressait au Palais d’Iéna deux pages d’analyse justifiant la non-recevabilité de la pétition. Interrogé le 22 février sur la décision qu’il serait amené à rendre, le Président lâchait le morceau au prix d’un beau mensonge et avant même d’avoir statué dans les règles : « La pétition demande que le Cese se prononce pour ou contre la loi. Constitutionnellement, c’est impossible. C’est donc irrecevable sur le fond ». Puis le 26 février la décision tombe : « Le bureau a constaté que les conditions de nombre et de forme étaient réunies […] Pour autant, et en vertu de l’article 69 de la Constitution et de l’article 2 de l’ordonnance du 29 décembre 1958 portant loi organique relative au Conseil économique social et environnemental, la saisine du Cese pour avis sur un projet de loi relève exclusivement du Premier ministre ». Interrogé la semaine dernière par nos confrères du Figaro, le professeur Didier Maus, spécialiste de droit constitutionnel, voyait pourtant l’issue de cette saisine d’un autre œil :« Rien n’empêche le Cese de se pencher sur des “évolutions sociales”, un terme à l’interprétation plus large qui figure dans la modification de la loi organique de 2010, ni de remplir un rôle d’expertise dans le domaine de l’actualité législative ». 

    Qui a déjà vu un organisme indépendant et souverain venir prendre ses ordres auprès du pouvoir politique, à part en Union soviétique ? Et arguer du droit pour mieux le renier ? « Tout votre beau système de droit n’est que négation du droit, injustice suprême », aurait hurlé le Doyen Carbonnier s’il avait été de ce monde pour assister à cette ineptie.
    Si le général de Gaulle avait eu l’impuissance de Delevoye en 1962, nous ne bénéficierions peut-être pas du suffrage universel qu’il eut le culot d’imposer par référendum en se soustrayant à l’exigence de modification constitutionnelle du Parlement. Si les sages du Conseil constitutionnel avaient partagé le manque d’audace de Delevoye en 1971, ils n’auraient pas eu l’audace d’élargir eux-mêmes leur champ de compétence au bloc de constitutionnalité pour protéger toujours plus l’Etat de droit. Si les juristes du XIXème siècle avaient eu la faiblesse de Delevoye, jamais la prérogative de puissance publique n’aurait pu être limitée par le droit administratif dont Prosper Weil qualifiait l’existence de miracle.

    Ce sont les hommes qui font l’institution. Que Jean-Paul Delevoye médite cette maxime.

    Théophane Le Méné
    in Causeur.fr, 6 mars 2013
  • La phrase interdite de Philippe Ariño

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    Genres
    1ère page d'un Dépliant Pédagogique interrogeant le Mariage Pour Tous

     

    « Personnellement, je n’aurais eu l’énergie de me déplacer que si on m’avait laissé dire plus tôt et tout haut la phrase interdite (ci-dessous) qui est notre talon d’Achille à tous si on s’obstine à ne pas l’assumer, et qui aurait pourtant suffi à elle seule à flinguer le projet de loi : « Au-delà des questions de filiation et d’engendrement, l’amour homosexuel n’est pas un amour comme un autre, aussi solide, complémentaire, paisible, porteur de vie, que l’amour fondé sur la différence des sexes… même s’il existe des couples qui intègrent la différence des sexes et qui n’en profitent pas. Il n’empêche que la différence des sexes, quand elle est accueillie et respectée, est le cadre privilégié et incontournable de l’amour vrai et concret. Les couples homosexuels, en ayant expulsé la différence des sexes qui leur aurait donné une consistance, sont moins comblants, satisfaisants, complémentaires, réels et incarnés, que les couples ou les célibataires qui ont accueilli la différence des sexes.Pour cette raison, on peut reconnaître que les couples homosexuels existent, on se doit de les respecter, et d’assurer socialement/légalement la protection de chacun des deux membres qui le composent, ainsi que parfois des enfants qu’ils éduquent… sans pour autant les justifier socialement/légalement comme un modèle d’amour structurant pour une société, ni leur faire croire qu’ils composeront un couple marié ou une famille. Il n’y a pas lieu de donner aux couples homosexuels le mariage (ils ne correspondent pas à la réalité du mariage, qui est définie par la différence des sexes ouverte à la génération, étant donné qu’ils n’intègrent pas la différence des sexes et qu’ils ne sont pas procréatifs),ni l’adoption(un enfant, pour exister et pour grandir au mieux, a besoin universellement que ses deux parents biologiques père et mère s’aiment),ni le PaCS(qui, en plus de garantir des droits individuels nouveaux à des couples de sexes différents ou de même sexe, était la première marche de justification sociale du couple homo en tant que modèle équilibré de civilisation). » Tant qu’on ne laisse pas les personnes homosexuelles énoncer publiquement cela, la « Manif pour Tous » ne sera pas efficace et n’a pas de raison d’être. Je resterai chez moi le 24 ! L’enjeu premier du mariage n’est pas l’enfant : c’est prioritairement le couple, l’amour et le Réel fondés par la différence des sexes ! »

     

    Philippe Ariño

    Araignée du Désert, 25 février 2013

     

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    2ème page d'un Dépliant Pédagogique interrogeant le Mariage Pour Tous

     

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    3ème page d'un Dépliant Pédagogique interrogeant le Mariage Pour Tous

     

     
  • Si un citoyen considère que ce sujet ne le concerne pas, il contribue de fait à ce que la loi passe. En matière pratique, je ne peux pas être neutre. Ne pas choisir, c’est déjà choisir.

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    Le philosophe Thibaud Collin, auteur des Lendemains du mariage gay aux éditions Salvator, s'entretient avec Vivien Hoch.


    V.H. Votre ouvrage se place clairement au plan délibératif, apte à pouvoir infléchir les jugements politiques sur le bien et le mal. Pensez-vous qu’il soit possible aujourd’hui de remettre les notions de « jugement moral » et de « bien et de mal » sur la table du politique ?

    T.C. : Quel est le critère de l’action politique ? C’est la justice. Il s’agit donc de rechercher le juste dans telle ou telle situation ou face à telle question. Ici, c’est par rapport au projet d’ouvrir le mariage civil aux personnes de même sexe qu’une décision doit être prise au terme d’une délibération. La question de l’articulation et de la distinction entre morale et politique est très complexe. Aujourd’hui, beaucoup pensent que le bien et le mal relèvent de la seule éthique personnelle dont chaque individu est la mesure et que le politique doit rester dans une neutralité éthique en promouvant de grandes valeurs formelles comme l’égalité, la liberté, la solidarité des individus. D’ailleurs, quand on parle de « morale politique » ou de « moralisation de la vie politique », on parle souvent du respect ou de la célébration de ces grands principes et du renforcement des procédures formelles.

    Ma question est : peut-on séparer la recherche du juste de celle du bien ? Si on raisonne dans les catégories que je viens de rappeler, toute législation qui se fonderait sur une conception du bien pour dire le juste serait accusée de vouloir imposer un « ordre moral ». Or la détermination concrète du juste n’est pas la simple application automatique d’un grand principe formel. La justice ne peut être rendue que lorsqu’on attribue à chaque partie en présence ce qui lui revient, ce qui lui est dû. Le concept abstrait et formel d’égalité des droits est un filet à mailles trop larges pour permettre de discerner. L’égalité de qui ? Dans quelle situation ? Dans quelle mesure tels droits font-ils naître tels devoirs correspondants ? L’être humain n’est pas une abstraction. Pour juger, il faut regarder la réalité des protagonistes. Or ici, les parties en présence ne sont pas d’un côté des « couples homos » et et de l’autre des « couples hétéros », les uns pouvant se marier et les autres ne pouvant se marier. Le droit de se marier n’a pas pour sujet le couple mais l’individu. Or aujourd’hui, n’importe quelle personne majeure peut se marier puisque l’orientation sexuelle n’est pas un critère pertinent. Les vraies parties en présence dans cette délibération sont donc, d’un côté, des adultes de même sexe et, de l’autre, des enfants qui seraient susceptibles d’être adoptés et/ou conçus par ces adultes. Le droit de se marier des uns implique pour les autres le devoir de reconnaître ces deux hommes comme étant leurs pères ou ces deux femmes comme étant leurs mères.

    Je demande : cet hypothétique devoir ne viole-t-il pas le droit de ces enfants d’être élevés par ceux dont ils sont issus ? Et là, on voit bien que seule une réflexion sur les biens essentiels d’un enfant permet de trancher et de discerner quel est le choix à faire. Impossible donc de séparer la recherche du juste de la recherche des biens engagés dans les relations entre les êtres humains.

    V.H. Votre propos consiste à montrer que reconnaître une évolution ne dit rien sur son caractère juste ou non. Toute nouveauté n’est pas bonne. Pourtant, comment résister à ce mouvement, alors que la tendance internationale est celle de la légalisation du « mariage » homosexuel ? 

    T.C. : À l’heure où de plus en plus de gens prennent conscience des effets souvent ambivalents des progrès techniques, il serait paradoxal que la mentalité progressiste apparaisse comme la seule légitime. Les discours d’un passé récent célébrant « les lendemains qui chantent » devraient nous avoir vaccinés sur les caractères soi-disant intrinsèquement bons du progrès ! La tendance internationale dont vous parlez est limitée aux pays qui sont plongés dans une crise anthropologique et intellectuelle sans précédent dont une des caractéristiques consiste à étendre les principes démocratiques au-delà de leur champ d’application strictement politique. Cette extension crée une mentalité dans laquelle peu à peu tout devient politique. Le paradoxe de notre délibération nationale actuelle est qu’il s’agit de débattre justement pour reconnaître qu’il existe des limites pré-politiques à la vie politique. Sinon, on considère que la limite n’en est une que parce qu’on en a décidé ainsi, ce qui est une conception arbitraire et volontariste de la limite. Pourquoi, en effet, poser la limite ici plutôt que là ? On le voit bien chez les socialistes qui considéraient jadis que le PaCS étaient suffisant pour donner un cadre juridique aux couples de même sexe et qui aujourd’hui considèrent que l’accès à ce seul cadre est une injustice à leur endroit.

    Je rappelle les propos bien connus d’Élisabeth Guigou, Garde des Sceaux en 1998 : « Pourquoi l’adoption par un couple homosexuel serait-elle une mauvaise solution (sic) ? Parce que le droit, lorsqu’il crée des filiations artificielles, ne peut ni ignorer ni abolir la différence entre les sexes. (…) Mon refus de l’adoption pour des couples homosexuels est fondé sur l’intérêt de l’enfant, sur son droit à un milieu familial où il puisse structurer son identité et épanouir sa personnalité. » La situation des enfants a-t-elle à ce point changé en moins de quinze ans pour que de tels propos puissent être reniés si facilement ? Rappelons que celui qui entre temps a converti le PS au mariage gay et à l’homoparentalité n’est autre que le célèbre Dominique Strauus-Kahn qui en 2004 déclarait dans Libération « Certains pensent que, par nature, il est dommageable pour un enfant d’être élevé par un couple homosexuel. Je considère que c’est une faute morale (sic), et, sauf à ce qu’on me démontre le contraire, un non-sens scientifique. »

    V.H. Votre chapitre sur la « dialectique » post-nieztschéenne mise en œuvre dans le « débat » aujourd’hui montre bien à quel point le « débat » se déroule selon une épistémologie orientée, inapte à faire porter les discussions sur un jugement moral et politique. Comment contrer cette dialectique omniprésente aujourd’hui ? Comment échapper à la dialectique ?

    T.C. : L’influence de Nietzsche est effectivement prégnante chez plusieurs philosophes dans la pensée desquels les militants gays ont puisé des termes et des méthodes de lutte. Citons les plus connus : FoucaultDeleuze et Derrida. On est bien sûr ici bien plus en présence d’un style de pensée, de manières de questionner ou de prendre les sujets que devant un corpus unifié. Le questionnement de type nietzschéen consiste à rechercher derrière un concept, une institution, une pratique des strates ou des éléments soumis à l’histoire et surtout aux rapports de force. « Il n’y a pas de faits, rien que des interprétations ». Tout ce qui apparaît dans un premier temps comme un donné stable peut donc être soumis à une enquête généalogique révélant les processus de sa constitution et les luttes cachées ayant rendu possible sa stabilisation.

    Dès lors, les principes du jugement moral et les principes anthropologiques ne sont que des constructions historiques. Vouloir s’appuyer sur eux comme sur des critères d’évaluation et de choix est perçu comme une atteinte aux dynamismes joyeux des forces vitales irréductibles aux catégorisation identitaires et binaires. Dès lors lorsque certains osent affirmer que l’ouverture du mariage et de la filiation aux personnes de même sexe porte aussi en elle la remise en cause de la monogamie ou de l’interdit de l’inceste, ils ne font pas de la surenchère extrémiste, ils nomment juste la cohérence du projet dionysiaque qui anime en sous-main cette revendication.

    La contestation des grandes différences articulant l’ordre humain est portée par une aspiration à l’indifférenciation dans laquelle peuvent s’exprimer et devenir librement les multiplicités singulières. Deleuze reprenait à Kierkegaard cette proposition : « Du possible, sinon, j’étouffe. » Je pense que l’on ne peut résister à cet élan proprement anarchique qu’en renvoyant nos concitoyens à leurs propres expériences fondamentales à partir desquelles ils peuvent refaire des inductions concluant à des référents universels. La plupart de nos contemporains ne pensent pas ce qu’ils ne vivent pas et du coup finissent par penser de manière aliénée. Il s’agit donc de traverser ce barrage mental pour les reconnecter avec leurs dispositions essentielles. Que chaque citoyen se pose sérieusement la question : « Est-ce que je souhaite ce qu’il y a de mieux pour cet enfant en le confiant à deux papas ou à deux mamans ? »

    V.H. : L’axe principal d’action consiste à promouvoir la « délibération » (apte à déboucher sur une décision) plutôt que le « débat » (d’où ne peut sortir qu’un « consensus »). Comment une délibération se présente-t-elle concrètement ?

    T.C. Une délibération n’est possible que dans la mesure où je suis en position d’agir. Je ne délibère pas sur ce qui ne dépend pas de moi, par exemple sur les choix que mon voisin fait. Je peux porter un avis dessus, poser un jugement de valeur mais je ne délibère pas. Se mettre dans une position de délibération, c’est donc ipso facto se disposer à se sentir concerné ; et surtout, cela permet de prendre conscience qu’étant en démocratie, il est de la responsabilité de tout citoyen de participer à l’élaboration de la loi. Un des temps forts de cette participation est bien sûr l’élection mais il existe bien d’autres moyens, après l’élection, pour continuer à s’engager. Si un citoyen considère que ce sujet ne le concerne pas, il contribue de fait à ce que la loi passe. En matière pratique, je ne peux pas être neutre. Ne pas choisir, c’est déjà choisir. Participer ici à la délibération consiste donc à utiliser sa raison pour discerner quels sont les moyens de promouvoir la justice dans les relations familiales dont le Code civil est le cadre juridique.

    V.H. Selon vous, quelle forme de riposte est à envisager ? Et plus généralement : faut-il débattre, au risque de « tourner en rond », ou envisager des formes plus entreprenantes de riposte (colloques, tracts, actions, manifestations, etc.) ?

    T.C. : Je pense qu’aujourd’hui, il est nécessaire de réclamer qu’une réelle délibération ait lieu. En effet, depuis l’annonce par le Garde des Sceaux des contours du projet de loi, les adversaires ont commencé à émettre des critiques et des objections mais celles-ci demeurent à ce jour sans réelle réponse. Jean-Marc Ayraut vient de réaffirmer que le texte passerait au nom de l’égalité sans prendre en compte le point de vue des enfants pris ainsi en otages. Seul un référendum donnerait un cadre permettant une délibération d’ampleur nationale car il obligerait la conscience de tout citoyen à prendre position de manière pratique.

    V.H. : Vous écrivez que la démocratie est ce régime « où les citoyens sont perpétuellement renvoyés à eux-mêmes et à leur capacité d’estimer le juste et l’injuste » ; et que cela requiert d’eux « vigilante attention au contenu complexe des questions qu’ils se posent », afin « d’honorer la grandeur du régime libéral ». Comment organiser notre société pour honorer au mieux cette grandeur libérale ?

    T.C. : La liberté véritable ne va pas sans responsabilité. En effet, tout usage de ma liberté est-il à la hauteur de mon humanité ? Certes non, chacun peut le vérifier dans sa propre vie. C’est l’expérience de la faute qui nous révèle notre conscience qui nous oblige à répondre de nos actes.

    Dans l’étymologie de responsabilité, il y a, en effet, répondre. Ma conscience est la médiatrice de ce que mon humanité exige de moi. Ce qui est vrai pour une personne ne le serait-elle pas pour une société ? L’histoire nous a livré de nombreux exemples de décrochage d’une société politique relativement aux exigences communes de l’humanité. La grandeur du régime libéral est de faire confiance dans les capacités des êtres humains à user de leur liberté en vue du bien. Il s’oppose au despotisme et à l’anarchie, tout deux enracinés dans le primat de la force écrasant la voix de la conscience. La démocratie libérale digne de ce nom offre un espace public dans lequel les citoyens peuvent discuter pour chercher à discerner le bien et le juste dans des situations concrètes. Cela ne veut en aucun cas dire que le bien et le juste sont le fruit de la volonté des citoyens, ce qui serait contraire avec l’idée même de discuter en échangeant des arguments raisonnables.

    La volonté entérine ce que la raison a discerné comme juste mais ne le détermine pas dans sa qualité de juste. Notre société honorerait donc la grandeur du régime libéral si elle pouvait délibérer de manière raisonnable de cette affaire touchant les fondements du lien humain.

    Nouvelles de France, 25 septembre 2012
     

     

  • Qui aurait imaginé devoir défendre l’altérité sexuelle à la source de toute vie ?

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     Photographie du collectif "La Manif Pour Tous" - 13 janvier 2013

    « Qui aurait imaginé devoir défendre l’altérité sexuelle à la source de toute vie ? L’immense foule du 13 janvier a manifesté son attachement viscéral à ce bien universel. J’ai salué ce jour-là, au Champ-de-Mars, un grand mouve-
    ment d’écologie humaine. Précisons qu’il ne s’agit plus seulement de décrire l’activité organisée de l’Homo sapiens : comme l’écologie environnementale, l’écologie humaine surgit de la prise de conscience d’une nouvelle capacité destructrice. Car
    des chercheurs tablent sur les biotechnologies et sur la loi pour défaire l’articulation entre nature et culture propre à l’humanité ; nouveau Prométhée, ils nous affranchiraient de l’évolution, en appliquant au corps humain les progrès de la génétique, des neurosciences, des nanotechnologies, etc. Ils rêvent tout haut de recréer un homme “augmenté” : supérieur, invulnérable, immortel. L’enjeu éthique est majeur.

    Dans une récente tribune pour Slate.fr, Jacques Attali, dont je ne suis pas un disciple, voit dans le mariage homosexuel une « anecdote », étape d’une déconstruction de l’anthropologie naturelle vers une « humanité unisexe ». Le mariage homosexuel consacrerait la rupture entre la relation sexuelle et la procréation… Un marché de fabrication d’enfants à la demande, vérifiés avant livraison, se profile. Des tenants de la théorie du genre comptent sur l’utérus artificiel pour “libérer” les femmes de la maternité. Mais surtout le lobby de la “transhumanie” vise carrément un nouvel homme, le Cyborg (organisme cybernétique) domptant les trois limites de notre nature : le corps (sexué), le temps et la mort. Le stock français des 171 477 embryons congelés (réclamés par des chercheurs) ou les frères américains conçus ensemble in vitro, mais nés à vingt ans d’écart, bousculent déjà ces limites. Hormone de croissance, pilule de la troisième génération… N’avons-nous pas assez d’apprentis sorciers ?

    Jacques Attali soulève trois questions : « Comment permettre à l’humanité de définir et de protéger le sanctuaire de son identité ? Comment poser les barrières qui lui permettront de ne pas se transformer en une collection d’artefacts producteurs d’artefacts ? Comment faire de l’amour et de l’altruisme le vrai moteur de l’Histoire ? »

    En affirmant que tout être humain est marqué par l’interdépendance, osons répondre que l’humanité vit de quatre aspirations spécifiques : amour, vérité, justice et paix. Inconsciemment la loi Taubira en priverait des enfants. D’autres dérives de toute-puissance menacent ces valeurs : l’euthanasie, contraire à la dignité humaine, l’eugénisme, qui décerne des brevets d’humanité, et son pendant, le transhumanisme, qui rejette la fragilité propre à notre identité.

    Face à ces fantasmes de toute-puissance, l’écologie humaine relève le défi d’une culture de vulnérabilité, clés du véritable progrès de l’humanité. »

    Tugdual Derville
    Valeurs Actuelles, 14 février 2013

  • N’acceptons pas un État qui aurait pour seul but de combler les désirs de chaque catégorie de la population au détriment des plus faibles et de l’ensemble de la société

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     Jean-Marc Veyron
    Maire de Chasselas
    Discours du 2 février 2013
    à Chalons-sur-Saône

     

    « Bonjour,

    Je suis homosexuel, et aussi maire de ma commune en Saône-et-Loire. Et je suis ici pour vous dire mon opposition à ce projet de loi du "Mariage pour tous" et je voulais vous faire partager quelques réflexions :

    - Je ne me reconnais pas dans les revendications du lobby interLGBT, qui par ailleurs n’a jamais été élu et n’est pas représentatif de l’ensemble des homosexuels, qui ne forment pas une communauté : y- a- t-il d'ailleurs une communauté hétérosexuelle ?

    - Ces associations ont toute leur légitimité – elles ont beaucoup fait pour nous rendre la vie plus douce, ont beaucoup fait aussi pour les malades du sida et il reste évidemment un travail énorme à faire, par exemple quand on sait que l’homosexualité reste un crime ou un délit dans plus de 80 pays ; MAIS cela ne leur donne pas pour autant une représentativité.

    - Des voix comme la mienne se lèvent – notamment avec le collectif homovox.com pour faire entendre un autre discours, plus ajusté, plus respectueux fondamentalement des personnes homosexuelles, des institutions qui structurent notre société et bien évidemment des enfants !

    - On nous parle d’égalité : je ne suis pas égal, je suis différent, ni mieux, ni pire, et à ce titre je réclame un traitement différent ; il est d’ailleurs curieux que ceux qui vilipendent depuis des années le mariage soient maintenant les mêmes à vouloir nous l’offrir : voudraient-ils nous faire un cadeau empoisonné ?

    - Chacun a ses limites. Ainsi mon manque d’enfant, mon désir d’enfant ne me donne pas le droit de priver un enfant de l’affection d’une mère : c'est simple, mais cela suffit à justifier le retrait de ce projet de loi qui finalement n'est que la conséquence logique d’une société individualiste, où chacun veut que l’Etat (ou la science) comble ses désirs, fut-ce au détriment de l’autre ou de la collectivité !

    - On nous rétorque que les enfants dans ces familles ont des destins équivalents aux autres : aucune étude sérieuse n’est venu l’étayer ; on a interrogé des enfants dans ce type de famille en concluant que tout allait bien... Vont-ils devant un micro reprocher à celui ou celle qui les éduque, qui les aime et qu’ils aiment, de les avoir coupé de leur père ou mère biologique, alors même qu’ils n’ont pas le recul suffisant sur leur enfance et adolescence ? Moi je n’ai compris mon enfance, comme beaucoup, qu’après l’âge de 30 ans... l’État doit proposer et favoriser avant tout aux futurs adultes ce qu’il y a de meilleur : l’altérité d'un couple homme femme.

    - Le discours ambiant sous-tend même parfois que les couples homosexuels seraient plus harmonieux : je vous rassure : ils ont les mêmes problèmes que vous, à cette nuance près, rarement évoquée car très sensible, et que je constate autour de moi : la non-altérité de leur relation me semble souvent être un terreau moins favorable à une complétude de la relation, et donc souvent à sa durabilité (voir chiffres de pacsage Insee/Ined, homo vs hétéro) ; cette souffrance est souvent niée en bloc car insupportable ; est-ce une raison pour modifier le sens du mariage ? je ne le crois pas. La semaine dernière, Mme Caroline Mecary, avocate influente, a demandé la suppression de la notion de fidélité dans le mariage… Je vous laisse seul juge…

    Ne modifions pas le sens du mariage, mais préférons offrir à ces couples et à ces enfants dans des situations qui existent un cadre législatif protecteur : il y a déjà de nombreux outils ; améliorons-les et faisons les connaître !

    Pour finir, je veux souligner que malgré mon opposition, il faut savoir être très nuancé dans ses propos car ce débat touche à l’intime de chacun, à sa vie affective avec sa fécondité, ses blessures, ses hauts et ses bas, et chacun sait combien cela n’est pas toujours facile !

    Ne jugeons personne, respectons chacun, mais n’acceptons pas un État qui aurait pour seul but de combler les désirs – fussent-ils légitimes et sincères - de chaque catégorie de la population au détriment des plus faibles et de l’ensemble de la société ! »

    Jean-Marc Veyron - Maire de Chasselas (Saône-et-Loire)

     

  • II – Qu'est-ce que le mariage ? : Quelques réflexions sur le projet de loi « mariage pour tous »

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    Le mariage, union d'un homme et d'une femme, a deux fondements, l'un naturel, l'autre social et symbolique. La part biologique plonge dans une profondeur et un mystère qu'il ne nous est pas donné d'élucider : c'est la différence sexuelle, c'est la sexualité elle-même. Qu'il existe dans le règne animal des formes marginales d'homosexualité n'élimine en rien la règle fondamentale de cette séparation et réunion procréative entre les sexes : elle est l'un des moyens de la vie de se renouveler, le moyen qu'a choisi précisément cette branche dont nous faisons partie, les mammifères, et longtemps avant nous les animaux les plus primitifs. Cette distinction est le signe d'une différence plus universelle qui est la condition même pour qu'il y ait monde. Dans les récits de création comme la Genèse, les Métamorphoses ou de traditions plus éloignées, le monde apparaît par la séparation des éléments. Sans différence, il n'y a pas de monde. Or, le mariage est une expression humaine, sociale et symbolique de cette différence essentielle.

     

    La part biologique reste irréductible et fondatrice du mariage, c'en est comme l'enracinement et la chair. C'est cependant la culture qui le constitue et le structure. De par le monde, il a existé et il existe plusieurs formes de mariage, mais celui instituant l'union entre personnes de même sexe, très récent, n'a pas de fondement culturel, pas plus qu'il n'en a de naturel. On parle de rites initiatiques masculins incluant une sexualité entre maître et disciple, mais cela n'a rien à voir. On dit que certains empereurs l'ont fait, que quelques rares tribus le pratiquaient pour leurs guerriers, mais jamais cela ne fut un fondement durable pour une grande civilisation, ni une nouvelle « parentalité ». Socialement, le mariage est d'abord un moyen d'éviter ou d'abolir des rivalités. Il institue ensuite la double filiation père-mère. Il est enfin le moyen de stabiliser une union devenue parentale, afin de donner à l'enfant une protection durable. L'héritage chrétien donne à cette union son caractère indissoluble, ce qui induit un principe de réalité parfois difficile à tenir, mais fondateur de la structure familiale que nous connaissons, le modèle père-mère-enfants.

     

    L'infidélité a toujours existé et aujourd'hui ce modèle se fissure ; est-ce un argument en faveur des unions homosexuelles ? Le modèle père-mère-enfants a ses propres complexes, ses difficultés ; est-ce un argument pour en créer un nouveau, qui d'ailleurs l'imite plus ou moins, mais en oblitérant la différence sexuelle et la procréation naturelle ? On nous parle de « l'évolution des mœurs », de « progrès social », mais ce nouveau « mariage » a pourtant des caractères fort archaïques. L'éclatement de la famille, les parents seuls, est-ce l'unique façon de concevoir la modernité ? La liberté, l'égalité, la modération de l'autorité, l'abandon de certaines croyances, le progrès technique et scientifique, une certaine clarification de l'esprit et la pacification des mœurs, voilà ce qu'on appelle idéalement modernité ou, peut-être, civilisation. Attention à ce modernisme qui ne favorise que les tendances de liberté et d'égalité au point de les diviniser et d'abolir toute distinction comme toute contrainte. Peut-être reste-t-il du sacré dans le fait de procréer et de porter la vie. Peut-être y a-t-il dans la différence sexuelle quelque chose aussi de sacré, c'est-à-dire au sens propre qu'on ne doit pas toucher. L'homme a-t-il changé de nature ? Le modèle père-mère-enfants est-il dépassé ? Notre société, ne se fondant plus que sur une unique valeur, la liberté individuelle, est en passe d'en faire un culte nihiliste. Cette religion paradoxale engendre un monde qui, loin de créer des personnes libres, les fragilise considérablement.

     

    La part biologique, la part symbolique, la part sociale anéanties au profit de l'individu tout-puissant, il ne reste du mariage, dans l'union entre personnes du même sexe, que le chiffre 2. Encore celui-ci semble incertain, on ne voit pas pourquoi il résisterait à la force de dissolution d'une idéologie qui se présente comme le sens inéluctable de l'Histoire. Le mariage, institution la moins discriminatoire qui soit, ne floue aucunement les homosexuels, à moins qu'on considère que la Nature – ou Dieu – les a discriminés en ne leur accordant pas de procréer. Ils en sont écartés parce que leur union ne répond pas à sa définition enracinée dans la biologie autant que dans le symbolique. C'est bien là l'un des enjeux : les défenseurs du mariage homosexuel veulent déconnecter la procréation de son acte naturel mais aussi détruire les bases d'une humanité fondée sur l'altérité sexuelle. Ils passent par la question homosexuelle pour faire voter des lois touchant à la bioéthique et à la filiation.

     

    On nous fait croire qu'il y a inégalité. En vérité, tout le monde a le droit de se marier. On oublie toujours de dire qu'il existe des degrés dans l'homosexualité, que quelqu'un a pu éprouver de telles tendances et les avoir dépassées, enfin que l'homosexuel est souvent un bisexuel, attiré par l'un et l'autre sexes. Un homme peut donc avoir connu l'homosexualité et se marier avec une femme, sans que cela constitue autre chose qu'une évolution personnelle. On nous fait croire qu'il y a des situations difficiles qui seraient arrangées par le mariage homosexuel. En vérité, les délégations d'autorité dans les familles dites « homoparentales » posent peu de problèmes, puisqu'elles sont selon la loi « implicites » pour les actes quotidiens. L'héritage, lui, ne nécessite qu'une déclaration écrite. Les mêmes qui disent que 50% des enfants naissent hors-mariage pour montrer que « les mœurs ont évolué » font mine de s'effrayer que les familles « homoparentales » se trouvent hors-mariage. Si un père de famille seul élève ses enfants en habitant avec sa mère, sa sœur ou son compagnon, cela change peu de choses au regard de la loi, et on ne voit pas comment de telles situations engendreraient soudain un droit au mariage. Il peut exister des contrats entre deux personnes concernant la cohabitation, la protection ou l'héritage, sans qu'il y ait à préciser la nature de leur relation.

     

    Historiquement, le mariage protège le plus faible, le couple mère-enfant, en instituant la présomption de paternité. Il oblige les personnes à certaines contraintes en vue de consolider le couple et la famille, ce qui a une influence stabilisatrice sur la société. Il ne s'agit donc pas de la reconnaissance publique d'un amour ou d'une union. Comme dit l'adage, s'embrasser n'est pas se marier... Proposer le mariage aux unions homosexuelles ne repose donc pas sur une telle reconnaissance, ni sur leur capacité procréative qui est inexistante, mais sur les droits qu'il implique, à commencer par l'adoption. C'est donc d'abord sur ce point qu'il faudra examiner un tel projet.

     

    Lucien Fornello pour La Vaillante

  • I – La logique du projet - Quelques réflexions sur le projet de loi « mariage pour tous »

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    On pourrait croire que le projet de loi « mariage pour tous » n'a pas de conséquence pour la majorité. On entend dire : « Je ne suis ni pour ni contre, pour moi ça ne change rien. Alors, s'ils le veulent... » Outre que ce raisonnement d'indifférence est par lui-même dangereux, le « ils » ici pose un problème, car de nombreux homosexuels ne réclament nullement ce droit, voire s'y opposent farouchement. Seule une minorité le revendique vraiment, et la question divise autant que dans le reste de la société. Il y a donc d'autres raisons à ce projet que de répondre à une revendication de ces personnes, nous verrons plus précisément lesquelles. Par ailleurs, on peut comprendre que des individus éprouvent le désir d'accéder au symbole du mariage avec une personne du même sexe, mais cela reste impossible par le seul fait qu'il est défini autrement. À moins qu'on décide que le désir crée le droit, il faut examiner les conséquences d'un tel projet, la première étant précisément de changer la nature du mariage.

     

    Une étrange logique libérale semble dire : « Le mariage existe, donc j'y ai droit, quitte à en changer les règles. Les enfants existent, je veux donc en avoir, même si je ne peux pas en faire. Les femmes existent, je veux donc avoir le droit d'en louer une pour me fabriquer cet enfant. » Cette logique du droit de tous à tout est en elle-même pernicieuse, car elle n'a pas de fin. Elle conduit aux abus. Elle défait les protections des plus faibles. Elle fragmente la société. Au nom de quoi refuser la polygamie à ceux qui la réclament, si c'est leur désir ou leur tradition ? Au nom de quoi refuser des unions incestueuses, puisqu'elles existent ? Et si la science le permet, au nom de quoi refuser à certains hommes de se greffer un utérus pour porter un enfant ? Accepter ce projet, c'est d'abord consentir à cette logique de l'extension illimitée des droits qu'on qualifie d'ailleurs, dans un vocabulaire plutôt de gauche, d'ultra-libérale.

     

    Ce projet a d'abord pour effet d'institutionnaliser l'idée que l'homosexualité est une catégorie ou un statut qui donne accès à des droits. Cela peut conduire à d'autres revendications ; par exemple, réclamer des quotas dans la représentation nationale, certains l'ont proposé. Cela n'a aucun sens, mais quand une logique se met en place, elle a toujours tendance à se poursuivre. En s'en tenant à la définition la plus incontestable, l'homosexualité reste une tendance ou une pratique sexuelle, non pas une appartenance ou une catégorie. Une pratique sexuelle définit-elle les individus ? À part celui de vivre libre et en sécurité, y a-t-il une raison d'accorder quelque droit que ce soit à des individus ou à des groupes au nom de leur pratique sexuelle ? Cela signifierait que les homosexuels doivent être considérés en tant qu'homosexuels comme les autres en tant qu'homme et femme. Ce raisonnement fort dangereux pourrait se retourner contre eux, alors que la plupart n'ont rien demandé. Il y a mille façons d'être homosexuel. Il n'y a pas d'être-homosexuel bien défini, et heureusement. Il en existe au moins deux grandes catégories que personne n'oserait confondre, à savoir l'homosexualité des hommes, et celle des femmes. La différence sexuelle, on ne la déloge pas si facilement...

     

    Lucien Fornello pour La Vaillante

     

     

     

  • IV – Les conséquences sur la filiation et la procréation - Quelques réflexions sur le projet de loi « mariage pour tous »

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    Rappelons le principe fondamental de l'adoption : il s'agit de donner une famille à un enfant, non pas un enfant à une famille. Il y a plusieurs types d'adoption : l'adoption simple ne rompt pas le lien avec le parent d'origine, tandis que par l'adoption plénière on devient intégralement et exclusivement parent. Dans les familles dites homoparentales qui existent, les enfants viennent pour la plupart d'un premier lit, d'une union homme-femme. On accorderait alors au nouvel époux une adoption simple. Or, il existe déjà des moyens de déléguer l'autorité légale sur un enfant et ces dispositifs peuvent être facilités ou étendus. Le mariage ne constituerait donc pas pour ces familles une avancée si importante. Il est faux de dire que ces personnes souffrent d'un vide juridique abyssal dans lequel leur existence même n'est pas reconnue, et que leur vie en est rendue affreusement compliquée. De nombreuses personnes jouent le rôle de parent de substitution dans une famille recomposée sans s'être marié avec leur conjoint. Ce n'est donc pas là que ce projet présente un changement majeur. Le mariage homosexuel, plutôt que de donner des droits à des familles, apporte en vérité essentiellement ceci : donner des enfants à des personnes qui n'en ont pas.

     

    Il y a environ 3000 enfants en instance d'adoption, 1000 enfants pupilles de l’État, 2000 à l'international, pour 24 000 couples éligibles à l'adoption. Attribuer à de nouvelles unions un tel droit ne permettrait donc pas, comme on l'entend souvent, de donner des parents à des enfants qui n'en ont pas, cela ajouterait simplement un peu de concurrence. L'effet serait d'ailleurs contraire, en empêchant nos familles d'accueillir de tels enfants, parce qu'un grand nombre de pays refuseraient d'envoyer leurs orphelins en France, précisément à cause de cette loi. Les gouvernements qui ont modifié la nature du mariage ont pu le vérifier. Il n'y a donc qu'une logique dans l'instauration du mariage homosexuel, ce n'est pas de régler des situations familiales, ni de confier des orphelins à des adultes, c'est la fabrication d'enfants pour ces unions, qu'on nous présente sous la locution technique et presque altruiste de « procréation assistée ».

     

    Pour les unions de femmes, une insémination artificielle d'une conjointe serait suivie par l'adoption plénière de l'autre conjointe, et l'enfant se retrouverait avec deux mères de plein droit. Cependant, il y a forcément ce qu'on appelle un donneur, qui devra rester anonyme et sera évacué de la filiation. On fabrique donc un être qu'on va priver volontairement, et non pas à cause des aléas de la vie, de sa filiation naturelle avec un père qui pourtant existe. On le prive doublement : sur le plan de la filiation biologique, ce qui n'est pas si indifférent que certains le prétendent, mais plus gravement encore sur le plan de la filiation symbolique, en supprimant tout bonnement la place du père. Un père, ça n'est donc rien ?

     

    Pour les hommes, il y a aussi nécessité d'un tiers, qu'on appellera cette fois mère porteuse. C'est-à-dire qu'en échange d'une compensation financière, une femme recevra un embryon conçu en laboratoire à partir d'un des deux hommes et d'une donneuse. On oublie souvent qu'il y a encore une autre mère : en effet, la donneuse de l'ovule étant souvent distincte de la mère porteuse, cela fait quatre personnes impliquées dans la filiation biologique ou symbolique de cet enfant. Deux mères fantomatiques, et deux pères symboliques dont l'un seul est biologique ! Voilà un enfant dont l'origine est scindée entre deux mères qu'il ne peut, dans la vie concrète, qu'imaginer. A-t-on mesurer le trouble que cela produit ? Quand la donneuse aura donné son ovule, la mère porteuse prêtera son ventre – et neuf mois de sa vie – pour accomplir la grossesse et l'accouchement d'un être qui deviendra pour elle un étranger. Outre le problème éthique évident que pose une telle transaction, là encore ce tiers est évincé de la filiation, en l'occurrence une mère qui pourtant existe et qui, elle, a eu le temps d'une première relation utérine avec l'enfant. Devant rester anonyme, ces deux mères seront également supprimées de la filiation, sur le double plan biologique et symbolique. L'enfant aura deux pères. La place de la mère : vide. Une mère, ça n'est donc rien ?

     

    La pratique de la mère porteuse n'est rien d'autre que la location du ventre maternel en vue de fabriquer un être humain. C'est donc la chosification de deux personnes, l'enfant et la mère, ainsi qu'un double drame humain. En effet, la mère vivrait les difficultés, les douleurs, les conséquences de la grossesse et de l'enfantement en même temps que le deuil de voir aussitôt sa progéniture partir sans trace. On oublie d'ailleurs toujours, dans notre tendance à l'individualisme, de se représenter cette personne avec son entourage : si elle est déjà mère, ses enfants comprendront-ils ce qu'elle fait ; son compagnon, ses proches, ne seront-ils pas eux aussi affectés par ce « travail » ? Quant à l'enfant ainsi conçu, il ne connaîtrait pas son origine et ne pourrait qu'imaginer cette mère qui, peut-être par pauvreté, peut-être pour d'autres raisons, a accompli ce « service » sans être, d'ailleurs, sa mère biologique. Quelle confusion ! Que ce soit pour des couples homme-femme ou pour des unions homosexuelles, cette pratique devrait révolter tout cœur humain.

     

    Et l'enfant conçu artificiellement, quand lui découvrira-t-on son origine ? Comprendra-t-il la logique de sa venue au monde ? Sera-t-il hanté par ce « donneur » ou cette « porteuse » qu'il lui sera selon la loi interdit de connaître ? Ces enfants seront donc uniquement conçus par la volonté et le désir d'adultes prêts à le priver d'un père, d'une mère, et de la nature même, puisqu'ils ne seront pas le fruit d'un accouplement, mais d'une manipulation de laboratoire ? Ces questions dépassent largement l'homosexualité. Elles touchent à la bioéthique dans sa partie la plus sensible : la conception de l'être humain. Voulons-nous vraiment déconnecter complètement notre venue au monde de la voie naturelle ? Voulons-nous condamner des enfants à être, dès leur conception, privés d'un père ou d'une mère ? N'y a-t-il pas ici l'utilisation de la question homosexuelle pour faire passer quelque chose qui en est fort éloigné, c'est-à-dire l'extension des exploitations de l'ingénierie biologique ? Et les personnes homosexuelles qui y sont légitimement opposées, pourront-elles supporter ce poids, que de telles lois furent faites en leur nom ?

     

    La filiation dans la loi française reconnaît deux branches qui, sans être toujours accolées à une réalité biologique, en reproduisent toutefois le schéma homme-femme. Jusqu'à présent, il y a deux branches distinctes, maternelle et paternelle, et si l'une manque, elle est simplement « vide ». On ne peut avoir deux branches « maternelles » ni deux « paternelles ». Avec la loi proposée, cette obligation disparaîtrait forcément, la filiation deviendrait indifférenciée. Deux branches toutefois, comme pour garder un dernier contact avec la réalité biologique, mais pourquoi ne pas étendre à trois, voire à quatre branches ? Le modèle juridique de filiation explose donc au profit de nouveaux critères flottants dans lesquels on ne voit plus de limite, puisque la nature en est proscrite, même en tant que référence.

     

    L'argument souvent exprimé pour soutenir une telle évolution est la mise en avant de la volonté. On deviendrait parent du fait de la volonté, ce qui a tendance à justifier toute forme de procréation assistée. On appelle « parent d'intention » celui qui ainsi exprime et réalise sa volonté d'être parent. Le donneur anonyme ou la mère porteuse ne sont donc pas parents mais techniquement géniteurs. L'enfant ainsi fabriqué, destiné à des personnes de même sexe, sera privé de sa filiation naturelle de façon volontaire. Qui peut croire que cela n'a aucune conséquence psychologique sur le sujet concerné et sur la société ? Et si on est parent par volonté, dès lors, peut-on cesser de l'être aussi par volonté ? En effet, si seule la volonté compte, un « droit à l'abandon » en est une conséquence assez logique.

     

    L'éducation, l'autorité, la responsabilité – sécurité, santé, moralité – appartiennent au père et à la mère. En cas de séparation, il existe une concurrence parfois malsaine mais bien compréhensible entre les deux parents pour obtenir la garde, et parfois avec les nouveaux conjoints en ce qui concerne certaines décisions. La loi est claire : à moins d'événements graves, le père et la mère de l'enfant gardent leur autorité et leur capacité de décision. Avec cette nouvelle loi, l'élimination du schéma père-mère biologique pourrait conduire à plus de concurrence et de complexité, d'autant que les homosexuels sont plus volages. Au risque de ballotter l'enfant entre les adultes, sans oublier que planeront les « fantômes vivants » des donneurs et des porteuses.

     

    Par ailleurs, avec les progrès de la médecine, il n'est pas exclu que le matériel génétique des deux hommes ou des deux femmes soient utilisés pour concevoir cet enfant en laboratoire et même, pourquoi pas, au train où vont les choses, que soit donnée la possibilité à un homme de porter l'enfant. L'humanité est à un tournant. S'il est possible, à très long terme, que nous allions vers une procréation plus assistée et extérieure, il est en revanche extrêmement dangereux de vouloir devancer ce processus en l'accélérant et en permettant l'accès à toutes les techniques dès qu'elles sont au point. Le risque d'eugénisme, de trafic, de commerce, de chosification de l'être humain est contenu d'une manière extrêmement dense dans la problématique du mariage homosexuel, même si on fait mine de séparer la question bioéthique de la question du mariage lui-même. En vérité, comme nous l'avons vu, l'un ne va pas sans l'autre. Par conséquent, pour en revenir à la procréation et à la science, ce n'est pas parce qu'une chose est possible, qu'il faut nécessairement l'intégrer dans le droit et il faut veiller, autant pour l'union homosexuelle que pour le couple homme-femme, à éviter la fabrication d'êtres humains.

     

    Lucien Fornello pour La Vaillante

  • III – La question de l'égalité - Quelques réflexions sur le projet de loi « mariage pour tous »

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    Il y a discrimination quand à partir d'une situation objectivement identique on détermine un choix sur une différence qui n'est pas de l'ordre de la compétence ou du droit, mais de l'être. On ne fait aucune discrimination aux homosexuels au sujet du mariage : nul ne refuse à une personne, si elle le désire, de se marier avec une personne du sexe opposé. En revanche, on ne marie pas deux personnes du même sexe. Pourquoi ? Les personnes sont parfaitement égales devant la loi, mais pas les types de relation. Le mariage, par définition, inclut l'altérité sexuelle. Changer cette définition ne peut reposer sur la question de l'équité, puisque un couple homme-femme et une union homosexuelle ne sont pas à traiter sur le même plan, à moins qu'on considère ces deux situations comme identiques en niant la différence sexuelle et la procréation sexuée, ce qui relèverait d'un étrange puritanisme. Le mariage homosexuel n'ouvre donc pas le mariage à des personnes qui en étaient injustement exclues, il change la nature du mariage, ce qui est fort différent. Ce raisonnement est imparable sur le plan logique, mais entrons plus avant dans les réalités qu'un tel changement engage.

     

    La capacité d'élever les enfants est donnée largement à tout adulte. Une personne homosexuelle en elle-même doit posséder cette capacité technique, intellectuelle et affective. Pourtant, nous pressentons bien que, dans la réalité, élever un enfant ne repose pas uniquement sur une question de compétence. Il y a une part ontologique irréductible dans la notion de parentalité. Ce n'est pas seulement un savoir-faire mais ce qu'on est qui fait de nous des parents. Et encore, ce n'est même pas ce qu'on est en tant qu'individu, mais ce qu'on est en tant que père ou que mère, ce qu'on devient dans l'exercice d'une relation, à savoir pour un homme avec une femme, et pour une femme avec un homme. L'altérité sexuelle qui institue biologiquement la famille est aussi celle qui la constitue sur le plan symbolique. Le célibat ou l'union homosexuelle qui excluent une moitié de l'humanité biologique et symbolique ne sont pas généralement considérés comme un cadre favorable à l'enfant, non pas que des compétences manqueraient à ces adultes, ou qu'on les rejetterait pour ce qu'ils sont, mais plus fondamentalement parce que la différence sexuelle y est absente.

     

    Cette différence, on le sait, produit aussi des difficultés qui paraissent parfois insurmontables. L'homme a besoin de ses « copains », la femme de ses « copines », pour retrouver une logique qui les rassure. Mais s'ils reviennent l'un à l'autre, si le couple dénoue ses crises, c'est pour ouvrir au sein des personnes une dimension essentielle, faite d'humilité, de responsabilité, de compréhension de l'autre. Dans une union homosexuelle, ce mouvement d'ouverture, même s'il existe, sera voilé par la ressemblance masculine ou féminine. Si l'homme et la femme sont amenés à élever des enfants, c'est que leur relation elle-même est une école de la réalité humaine la plus complète.

     

    En cas d'adoption, le couple homme-femme reste donc le modèle, dans le but explicite de donner à l'enfant un équivalent de la situation biologique et symbolique incluant cette altérité, pour lui permettre de grandir sur la base de l'identification à une humanité complète. Le fait qu'on accorde le droit d'adoption aux célibataires n'est qu'une exception peu exercée, sur laquelle on pourrait d'ailleurs revenir, puisque ce dispositif visait à donner aux orphelins un parent à une époque où il en manquait, alors qu'aujourd'hui il ne manque pas de couples candidats à l'adoption. Le fait qu'il y ait des familles monoparentales n'est pas non plus un argument, puisque ces situations ne sont pas créées volontairement, en tout cas la loi ne les reconnaît pas comme telles, et peu d'entre nous contesteront qu'elles sont attachées à des difficultés tant matérielles que psychologiques. Le fait que toute famille ait ses problèmes n'est pas non plus un argument. La complexité du réel ne peut empêcher de voir qu'ici se posent des questions de structure pour l'avenir de la société.

     

    La situation, qui reste exceptionnelle, des familles dites « homoparentales », doit-elle donner lieu à un mariage et être instituée comme un modèle équivalent à la structure père-mère-enfants ? Doit-on ouvrir l'adoption et la procréation à ces unions ? N'est-il pas, aujourd'hui comme hier, toujours préférable d'accueillir un nouveau-né dans une famille stable, fondée sur la différence et la complémentarité homme-femme ? On nous présente le projet de loi « mariage pour tous » comme un progrès dans l'égalité entre les êtres, mais, en décidant que certains enfants, au nom du désir des adultes, n'auront pas de père ou de mère, il crée au contraire une formidable inégalité entre les êtres. Un enfant n'a-t-il pas le droit naturel de bénéficier d'une filiation symbolique fondée sur l'altérité père-mère ? N'a-t-il pas le droit de connaître sa filiation ? Loin de réparer une injustice, ce projet en produit d'insoutenables, comme nous allons le voir plus en détail.

     

    Lucien Fornello pour La Vaillante

  • V – La différence éclate au grand jour - Quelques réflexions sur le projet de loi « mariage pour tous »

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    On peut admettre que des hommes se sentent femmes ; des femmes, hommes ; ou encore ni l'un ni l'autre ; mais de là à imposer ce modèle en nous envoyant le signal que nous sommes tous des êtres flottants, comme certains veulent l'introduire dans les programmes scolaires dès le plus jeune âge, il y a là une manipulation et un abus de pouvoir manifestes. La théorie du genre est actuellement introduite avec force non seulement en France, mais dans le monde entier, puisque cette idéologie est soutenue par les instances internationales. C'est une théorie désincarnée qui va, dans sa version la plus radicale (celle qu'on a retenue) jusqu'à nier la biologie dans la constitution des personnalités. Tout serait culturel, et l'homosexualité serait depuis les origines opprimée par le modèle dominant. Cette vision qui nie la réalité la plus évidente ne tient pas un instant à l'analyse. C'est pourtant elle qui nous amène au débat d'aujourd'hui.

     

    Le mot « hétérosexuel » forgé en opposition au terme « homosexuel », nous n'en avions auparavant nullement besoin pour désigner l'union homme-femme, qui n'est pas une sexualité parmi d'autres, mais qui reflète la réalité humaine en son altérité essentielle. On oppose l'un et l'autre comme s'il s'agissait de deux modèles concurrents, c'est faux. L'homosexualité ne peut être considérée sur le même plan. De plus, elle n'a pas de contour précis : homosexuel, on peut l'avoir été et ne plus l'être, l'être un peu ou beaucoup, exclusivement ou pas du tout. Ce n'est donc ni une essence, ni un comportement fixe, mais une réalité psychique, intime, qui a toujours existé, qui existera toujours et qui, probablement, gardera toujours sa part de mystère et de complexité. Peut-être certaines personnes sont-elles intrinsèquement disposées, dès leur naissance, à l'homosexualité, mais il est plus vraisemblable que cette tendance naisse de l'histoire de l'individu et de sa construction. La « théorie du genre » voudrait nous faire croire le contraire : être homme ou femme serait « une construction » tandis que l'homosexualité, elle, serait de l'ordre de l'essence. On renverse les choses ! C'est précisément de l'ordre de l'ontologie que d'être homme ou femme, tandis que l'homosexualité est plus « construite ». Cette idéologie inverse les données les plus fondamentales et les plus évidentes au nom de la toute-puissance de l'individu. Le mariage homosexuel est l'expression, la concrétisation d'une philosophie de l'indifférenciation et du constructivisme qui nie le réel en prétendant qu'il n'y a pas vraiment de sexe et qu'on choisit son « genre ». Le mariage homosexuel institutionnalise la négation de la différence homme-femme jusque dans leur fonction de père et mère. Du coup, l'union et la « parentalité » homosexuelles seraient reconnues comme un modèle équivalent à celui du mariage homme-femme. Qui peut croire à cette escroquerie ?

     

    Nul ne croit, ni les personnes concernées, ni celles qui les connaissent, que les tendances homosexuelles amènent au bonheur et soient à promouvoir. On nous parle du taux de suicide chez des jeunes homosexuels en attribuant cela à « l'homophobie », ce qui permet de culpabiliser, de méduser les personnes qui voudraient s'opposer au projet. On ne peut nier que des phénomènes de rejet existent, mais ces suicides sont peut-être aussi dus à la difficulté de vivre l'homosexualité elle-même, qui constitue pour le sujet une contradiction dans son propre corps. Par ailleurs, il est notoire et confirmé par des études que les unions homosexuelles sont beaucoup plus instables que les couples homme-femme. Beaucoup d'homosexuels le disent. Veut-on vraiment ériger ce type d'union et de parentalité artificielle au rang de modèle social ? N'imaginons pas que cette loi serait sans conséquence anthropologique : elle troublerait les plus faibles sur leur propre orientation, elle agirait sur les psychismes des enfants, elle augmenterait considérablement le relativisme et créerait des phénomènes de mimétisme. Le mariage homosexuel agirait donc comme un signal fort déplaçant les repères existants, et c'est bien ce que recherchent ses promoteurs, mais dans quel but ?

     

    Parlant de différence, on me dira que les homosexuels justement sont différents. C'est vrai, et il faut les accepter comme tels. Ils ont une place, qui n'est pas celle des parents. Ils sont féconds autrement. Ils l'ont toujours été, à la mesure de leurs talents particuliers. Il n'y a pas de haine contre l'homosexualité, encore moins contre les personnes homosexuelles, dans un refus argumenté de ce projet, car au contraire, je crois presque évident qu'une telle loi non seulement embrouille la notion de parent mais qu'elle détruit la singularité et pour tout dire la beauté d'une union homosexuelle, à savoir qu'elle est une « amitié particulière », non familiale, unique. Cette loi laide est pleine de ce furieux conformisme de la modernité qui nous veut « tous pareils ». Laissons-nous donc la liberté de dire une fois pour toutes, avant que ce ne soit frappé d'interdit par le nouveau puritanisme planétaire, qu'un couple homme-femme et une union homosexuelle, non, ce n'est pas la même chose ! Notre époque a des formes de négation du réel qui lui sont propres, cette idée du mariage homosexuel en est un exemple beaucoup plus puissant qu'il n'y paraît.

     

    Aimer, c'est autre chose qu'être amoureux. Cela commence précisément par le désenchantement. Comme la pensée, l'amour est la prise en compte du réel, il brise notre toute-puissance pour nous mettre au monde. « Diminuer pour grandir » est le principe qu'on apprend à l'enfant pour l'aider à quitter sa toute-puissance infantile, mais l'adulte doit conserver un tel principe s'il veut avancer dans la vie. En terme spirituel, on appelle cela l'humilité... Comme le clament les partis politiques et les courants philosophiques qui le défendent, ce projet de loi brandit une liberté « affranchie de Dieu comme de la Nature », c'est-à-dire, en fait, de toute métaphysique et de toute réalité pour laisser place à la toute-puissance de la volonté. Ce prométhéisme, loin de tenir ses promesses de liberté, tend à modifier la notion même d'humanité. Si, comme l'affirme Hannah Arendt, l'un des buts et des moyens de la société totalitaire est la négation de la différence, l'idéologie du genre et ses applications dans l'éducation, la procréation et la filiation portent de très graves dangers ; pour tout dire, elle contient des ferments totalitaires.

     

    On pourrait croire que le projet de loi « mariage pour tous » n'a pas de conséquence pour la majorité. En fait, il y va de notre humanité. Outre que toute la société en serait touchée dans ses fondements, les bouleversements bioéthiques que cette loi entraînerait sont incalculables. Nous changerions non seulement de modèle familial, mais de moyen même de procréation, car la disjonction entre l'acte sexuel et la procréation serait consommée. Nous ne le mesurerions pas aussitôt, car cela se passerait à long terme, mais il y a bien un projet anthropologique dissimulé dans ce « mariage ». La France a une tradition éthique qu'elle est en train d'abandonner sous la pression de groupes qui ne représentent absolument pas les personnes. Le mouvement qui se lève contre le projet « mariage pour tous » pourrait sonner l'heure du réveil.

     

     

    Conclusion

     

    L'homme et la femme constituent l'humanité. Même s'il y a des ressemblances, une part de construction culturelle, cette différence essentielle, qui n'est pas que physique, sensible ou psychologique, mais ontologique et mystérieuse, plonge dans nos origines et ne peut être relativisée au-delà d'une certaine limite. L'homme et la femme sont différents, complémentaires, appelés à l'union et à la fécondité. Le projet de mariage homosexuel contient des logiques et des conséquences d'une grave portée. Aucun avantage, aucun intérêt social majeurs n'y sont contenus. Tout y est au contraire contestable, de ses intentions à ses finalités, jusqu'en ses applications concrètes. À moins de croire l'homme et la femme, au-delà de leur égalité de droit, rigoureusement identiques sur tous les plans, et qu'un père et une mère sont exactement la même réalité pour un enfant, il n'y a aucune raison de soutenir un tel projet.

     

    Nous avons, au contraire, quelques raisons fondamentales de nous y opposer de toutes nos forces.

     

    Notes :

     

    I – La logique du projet

    Le projet « mariage pour tous » est d'essence libérale sur deux plans : sa façon de donner à l'individu l'extension maximum de droit, combat souvent attribué à la gauche ; mais aussi la libéralisation économique que cela entraîne, à savoir l'extension illimitée du marché jusqu'à faire des corps et des personnes un objet de commerce ou de négociation, tendance plutôt attribuée à une partie de la droite, dite justement « libérale ». On voit avec ce projet, voulu autant par la gauche gouvernementale que par l'extrême-gauche et une partie de la droite, que, loin de combattre le libéralisme, la gauche sociétale en est à la pointe en éliminant toutes les structures qui modèrent l'idéologie individualiste. « Tout est à nous » fut ainsi la devise d'un rassemblement d'extrême gauche. Parmi leurs revendications, on voit des avancées aussi intéressantes que l''avortement à 24 semaines (soit 6 mois) ; l'euthanasie ; dans un autre domaine, le droit des élèves à partir de la 5ème de choisir leur programme ; la majorité à 16 ans ; sans oublier, bien sûr, d'ouvrir les sols et tous les droits de façon illimitée ; en bref, d'éliminer toutes les frontières symboliques ou réelles. On imagine combien le « Grand Capital » tremble devant de telles revendications, qui sont justement les siennes. Marx lui-même avait prévu cette stratégie révolutionnaire du Capitalisme. Sur les liens historiques de la gauche avec le libéralisme et sur « l'extrême-gauche ultra-libérale », les livres de Jean-Claude Michéa, notamment L'impasse Adam Smith ou L'empire du moindre mal publiés en poche dans la collection Champs-Flammarion, sont renseignés et convaincants. Qui a voulu le projet de loi « mariage pour tous » ? Le groupe de pression LGBT composé d'environ 2000 personnes doit avoir un pouvoir considérable puisqu'il est le seul à avoir milité en sa faveur, en l'absence presque totale de soutien de la part des personnes prétendument concernées, à savoir les homosexuels. En vérité, il y a grande apparence, et elle ne s'en cache pas, que la loge maçonnique du Grand Orient de France, branche humaniste inspirée des « Lumières », de sensibilité de gauche, dont la philosophie peut se résumer à l'idée que l'homme doit déterminer et construire son destin sans aucune considération de la nature ou de la métaphysique, que cette loge, donc, a sinon inspiré, du moins fortement soutenu ce projet, qui est également voulu par des pouvoirs économiques et financiers, comme on le voit à travers l'unanimité des médias en sa faveur ou, plus concrètement, par la prise de position de certaines entreprises dans la publicité ou les dispositions sociales anticipant le projet (par exemple, SFR). Pour finir, on pourrait résumer le phénomène général de ces « évolutions de société » par une dualité étrange mais fort efficace : la toute-puissance de l'individu d'une part, et une force implacable et inéluctable qui serait le sens de l'Histoire d'autre part. Le refus de ce projet est donc aussi un sursaut de la conscience à la fois personnelle et collective contre l'image d'un monde indifférencié et atomisé où n'existent plus que l'individu et la masse aveugle, mais aucun « bien commun », et où il est interdit de contester des « évolutions » qui seraient en somme implacablement naturelles alors même qu'elles reposent sur une négation de toute définition naturelle. Si nous n'y prenons garde, on nous présentera un jour la possibilité d'éliminer les nouveaux-nés comme une avancée des droits et un progrès social.

    II – Qu'est-ce que le mariage ?

    Bien sûr, je ne fais que brosser à gros traits les contours du mariage que nous connaissons. Il existe différents types d'union et d'exercice de l'autorité des adultes envers les enfants ; des formes polygames, tribales, claniques, etc. Il faut lire les anthropologues et les historiens pour avoir une idée de ces divers modèles à travers l'espace et le temps. On dit que Néron, entre deux massacres, se mariait avec un « mignon ». On dit que des catégories de guerriers, dans une tribu insulaire, se mariaient entre eux, peut-être pour éviter des rivalités et contrôler les naissances. Je ne suis pas sûr que ces exemples favorisent la propagande pour le prétendu « mariage pour tous »...

    III – La question de l'égalité

    Il y a deux types d'égalité : celle du droit, à laquelle la plupart d'entre nous sont attachés, et celle de l'indifférenciation. Si tout est égal, il n'y a plus d'être et de distinction. Jusqu'à présent, notre vision repose sur une métaphysique typiquement chrétienne que la tradition républicaine a reprise pour une large part : l'égalité ontologique dans la distinction. Nous sommes à la fois égaux en dignité et uniques. On voit que ces deux principes d'égalité peuvent entrer en conflit. Dans les cas concrets, la plupart des familles qui nous sont présentées comme « homoparentales » viennent d'une séparation. Par exemple, on lit sur le site M6.fr, qu'un homme avait quitté sa femme en lui révélant son homosexualité juste après l'accouchement et s'était aussitôt installé avec son compagnon. Dans ce cas précis, il avait obtenu la garde de l'enfant les jours de semaine, tandis que sa mère le gardait les week-ends. Ces personnes, présentées comme un modèle de famille homoparentale « sans problème », n'obtiendraient pas grand-chose par le nouveau mariage, puisque des délégations parentales sont déjà prévues dans la loi et que pour un certain nombre de questions la mère, bien entendu, reste décisionnaire. Le nombre de ces familles est difficile à évaluer mais, contrairement à ce qu'on dit, le nombre total de personnes concernées, incluant enfants et adultes, ne doit pas dépasser quelques milliers. Il y a donc eu clairement une manipulation répétée dans les médias en nous faisant croire que l'existence de ces familles créait la nécessité d'une nouvelle loi. Cette législation en vérité n'a qu'une seule logique : l'accès pour les unions homosexuelles à la « procréation médicalement assistée » dont la très coûteuse technique (15 000 euros en moyenne) serait bien sûr prise en charge par la Sécurité Sociale. 

    IV – Les conséquences sur la filiation et la procréation 

    On me reprochera d'avoir mêlé la question du projet « mariage pour tous » avec les lois de bioéthique qui seront votées après. Mais c'est une stratégie mensongère que d'avoir dissocié les deux alors qu'elles étaient réunies au départ. La conséquence immédiate et logique du « mariage pour tous » est le projet anthropologique de libéralisation complète des questions de filiation et de procréation. Cela signifie que nous ne devons pas nous contenter de nous mobiliser contre ce projet qui rassemble facilement à cause du symbole du mariage, nous devons rester vigilants sur ces questions bioéthiques, que ce soit d'ailleurs au sujet des homosexuels, des célibataires, ou des couples homme-femme. Il est incontestable que le projet du gouvernement est de faire passer ces nouveautés. Il n'est qu'à entendre sa porte-parole, Mme Najat-Vallaud-Belkacem, qui milite pour la Gestation Pour Autrui (notez l'expression altruiste pour qualifier la pratique de la mère porteuse) et qui veut dissocier complètement filiation et procréation. Pierre Bergé, ex-compagnon de Christian Dior, milliardaire propriétaire du Monde et du magazine Têtu, emblème de la gauche libérale, a quant à lui déclaré : « Je suis pour la liberté complète sur cette question. Je ne vois pas de différence entre louer ses bras dans une usine et louer son ventre ». On dit que certains militent déjà pour une libéralisation complète des techniques de procréation à toute personne qui le désire, célibataire, femme qui refuse de porter elle-même son enfant même si elle est féconde et en couple, etc. Je rappelle que jusqu'à présent ne peut bénéficier d'une insémination artificielle qu'une femme en couple dont la stérilité est médicalement avérée. Il est à noter que, grâce aux progrès scientifiques, l'embryon qui a pour l'instant besoin d'une donneuse pourrait bientôt provenir génétiquement de deux hommes, et peut-être de deux femmes, ce qui ouvre encore une perspective inquiétante pour notre humanité. Parmi les souffrances attachées à l'homosexualité, la première est évidente, c'est l'absence de l'autre sexe ; la seconde, qui en découle, est l'absence de procréation. Or, le mariage homosexuel pourrait entraîner des familles unisexes, comme il en existe déjà, puisque beaucoup de femmes auront tendance à choisir des filles et les hommes des garçons, comme cela se voit déjà. Un reportage montrait une famille de quatre personnes formées de deux mères et de deux filles. L'une des mères, regardant la télévision avec une fille et se plaignant qu'il n'y avait que « des hétéros », se connecta sur une chaîne spécialisée où elles purent voir leurs « semblables »... Nul doute que les personnes homosexuelles ont des qualités, qu'elles seraient en elles-mêmes potentiellement de bons pères ou de bonnes mères, mais comment croire qu'elles pourraient l'être en restant dans le schéma d'une union homosexuelle, qui les prive de la relation fondamentale qui nous rend parent sur le plan biologique mais aussi symbolique ? Sous prétexte d'abolir une discrimination qui n'existe pas à l'égard des homosexuels, on en produit une très grave à l'égard de certains enfants, privés d'une moitié de l'humanité.

    V – La différence éclate au grand jour

    L'homosexualité, même s'il est important de rappeler qu'elle est pour l'essentiel involontaire, constitue une certaine forme de clôture par rapport à l'altérité. Ce n'est pas là un jugement, c'est un fait. La promotion de l'homosexualité au rang de modèle n'est pas secondaire dans ce débat. De peur de blesser les personnes, on refuse de penser l'homosexualité elle-même, devenue intouchable. Au nom de la lutte contre toutes les discriminations, on méduse les gens : ils sont racistes, homophobes, etc, dès qu'ils prononcent un avis contraire à la pensée unique. Or, penser, c'est toujours discriminer, c'est toujours faire une différence. On doit lutter contre les injustices, les inégalités, protéger les gens de l'intolérance et promouvoir une société pacifiée, mais attention à la guimauve qui cache des intentions féroces, attention à ne pas absolutiser le concept de « lutte contre toutes les discriminations » en arme de destruction massive de la pensée ! Si l'on cherche vraiment à comprendre pourquoi on prépare dans l'opinion et on met en œuvre un tel projet, je crois qu'il faut d'abord prendre conscience de sa dimension mondiale : il correspond exactement dans la sphère intime la plus essentielle à la volonté de déraciner, de désincarner toutes les formes d'identité et d'appartenance, nationale, religieuse, culturelle, pour les fondre dans le socle commun du mondialisme. En attaquant la différence sexuelle, on fait un pas de plus vers l'individualisme total. La mondialisation nous oblige à une certaine convergence et à l'effort de paix, mais le mondialisme, lui, est la négation de toutes les différences en vue d'établir un empire idéologique et matérialiste basé sur l'individu, l'argent et la masse. Il y a là un combat dont le « mariage homosexuel » n'est qu'une petite partie...

    Bon vent ! Belles rencontres ! Et vivent nos différences !

     

    Lucien Fornello pour La Vaillante

  • Synthèse argumentative sur le projet de loi Taubira « mariage pour tous »

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    « Le mariage homosexuel est un progrès, il montre que la société a évolué et reconnaît l'amour de tous ». Faux. La société n'a pas à reconnaître les tendances sexuelles ni les sentiments, où cela s'arrêterait-il ? Le mariage n'a pas pour but de reconnaître un amour ou une union, qui sont de l'ordre de la sphère privée, il institue la parentalité, ce qui est fort différent.

     

    « Ça ne change rien si les homosexuels veulent se marier ». Faux. Cela produit de nombreux bouleversements dans la filiation et la procréation artificielle en libéralisant ces domaines. Par ailleurs, il est également faux de dire que les homosexuels veulent se marier. Seuls quelques uns, et encore ultra-minoritaires, le désirent. Il n'est qu'à voir les statistiques du Pacs, presque exclusivement utilisés par des couples homme-femme. Il faut donc chercher les raisons d'un tel projet ailleurs, justement dans cette « bombe libérale » qu'il constitue dans le droit. Les branches paternelle et maternelle de la filiation seraient de fait éliminées et remplacées par deux branches indifférenciées. Seul subsisterait du modèle ancien le chiffre « 2 », mais on peut très bien imaginer qu'on n'en reste pas là et que la filiation soit encore plus libéralisée, vers la polygamie par exemple.

     

    « Le projet de loi ''mariage pour tous'' est une question d'égalité ». Faux. Dans la République française, les personnes sont considérées comme rigoureusement égales, non pas les types de relations, les groupes ou les situations. Un couple homme-femme ne représente pas la même situation qu'une union homosexuelle. Ils doivent donc être traités de manière différente, notamment du fait que l'un constitue une union procréative qui contient l'altérité sexuelle, alors que l'autre, non.

     

    « Le projet de loi donne le mariage à des personnes qui en étaient exclues ». Faux. Nul n'est exclu du mariage. Seulement, il prend en compte la procréation et la filiation sur le plan biologique, ainsi que la paternité et la maternité sur le plan symbolique. Il inclut l'altérité sexuelle par définition. Le projet n'élargit pas le mariage, il en change la nature.

     

    « On peut être pour le ''mariage pour tous'' sans être pour l'adoption et la procréation assistée ». Faux. Le mariage conduit automatiquement à l'adoption. De plus, la procréation assistée a été dissociée in-extremis du projet mais est contenue dans sa logique. Comme on le voit dans les dernières avancées de Mme Taubira, la pratique de la mère porteuse sera reconnue implicitement : quelle différence morale y a-t-il entre l'accepter en France et l'accepter pour les femmes étrangères à travers l'adoption ? De toute façon, la revendication est là et viendra tôt ou tard comme une nouvelle « avancée » au nom de l'égalité.

     

    « Les homosexuels peuvent très bien élever des enfants ». Certes. Nul ne dit qu'ils sont incapables d'élever des enfants, mais la constitution d'une famille ne répond pas qu'à des critères de compétence. Devenir parent, c'est d'abord entrer dans la relation d'altérité entre homme et femme. C'est ainsi qu'est établie la nature, mais c'est aussi le socle de notre construction symbolique en tant qu'humanité. Le mariage homosexuel instituerait le modèle unisexe comme équivalent et égal au modèle père-mère-enfant(s). Est-on bien sûr d'en mesurer la portée ?

     

    « Refuser ce projet, c'est être homophobe ». Faux. Beaucoup d'homosexuels sont contre. On peut le refuser pour des raisons éthiques, pour éviter une souffrance à des êtres dont l'origine serait artificielle (conçus en laboratoire) et éclatée (ils auraient jusqu'à deux mères naturelles qu'ils n'auraient pas le droit de connaître, deux pères dont l'un seulement serait biologique, c'est le cas pour un enfant de mère porteuse : quatre parents, dont deux mères interdites). On peut aussi craindre la marchandisation du corps des femmes et des enfants fabriqués.

     

    « Je suis pour ce projet parce que je suis de gauche ». Ah bon ? Donc nier la différence homme-femme, libéraliser la fabrication des enfants, faire des utérus un commerce, exploser la filiation et accréditer des catégories sexuelles comme des ayants-droit, ce sont des idées de gauche ? Ce projet est ultra-libéral. On a le droit de le défendre, encore faut-il savoir ce qu'on défend ainsi...

     

    Lucien Fornello pour La Vaillante

     

  • Ce dont la Tour Eiffel a été témoin le 13/01/13 - Rendez-Vous le 24 mars à Paris

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    Photographie du collectif "La Manif Pour Tous" - 13 janvier 2013

     

    "Les Zamis, zéro découragement ! Pensons aux résistants qui nous ont précédés.
    Allons aussi jusqu'au bout pour servir la justice et la paix.
    "

    Tugdual Derville

    Tweet du 9 février 2013


    On ne ment pas aux enfants,

    On ne ment pas à la Tour Eiffel,
    On ne ment pas à La France,
    On ne ment pas à La Vaillante.

    Rendez-vous le 24 mars à Paris


    « Le gouvernement comme le chef de l'État n'ont pas encore mesuré tout de ce qui se joue avec notre mobilisation, même si son caractère historique est incontestable. C'est à nous de leur montrer notre ténacité... Il nous faut continuer à débattre partout en France sur le sujet, sensibiliser les parlementaires dans la durée et investir la rue par diverses initiatives. Mais ce qui est né dépasse largement le quinquennat actuel. Notre engagement est méta-politique : il doit rayonner dans toutes les sphères de la société. Nous n'avons rien à vendre ni à acheter, étant mus par un altruisme qui nous fonde sur le roc ! Je crois surtout que l'attitude de non-violence, d'écoute et de respect est le meilleur gage de notre réussite. Face à la posture souvent agressive de nos adversaires, la bienveillance tenace est notre force. L'élan irréfragable né le 13 janvier est un mouvement de paix sociale. »

    Tugdual Derville

    Politique Magazine, 6 février 2013

  • Une loi que l’on ne peut pas prendre à l’essai

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    Projet de loi ouvrant le mariage aux couples de personnes de même sexe
    Intervention d’Henri GUAINO, Député des Yvelines,
    Pour la motion de rejet préalable
    Mardi 29 janvier 2013


    Monsieur le Président,
    Mesdames les Ministres, 
    Mes chers collègues,

    Permettez-moi de commencer par tenir une promesse que je me suis faite un triste jour de janvier 2010 dans la Chapelle des Invalides : 
    en prenant pour la première fois la parole à cette tribune, je veux rendre hommage à une grande voix républicaine qui s’est tue trop tôt, celle de Philippe Seguin.

    Le 5 mai 1992, certains d’entre vous s’en souviennent, c’était la nuit tragique de Furiani, il était monté à cette même tribune et avait déclaré « je voudrais croire que nous sommes tous d’accord au moins sur un point : l’exceptionnelle importance, l’importance fondamentale du choix auquel nous sommes confrontés. »

    Puis, il avait demandé à l’Assemblée de déclarer irrecevable le projet de loi Constitutionnel qui devait permettre la ratification du traité de Maastricht, parce que, disait-il, le Parlement n’avait pas le droit de prendre seul une telle décision.

    Aujourd’hui, c’est pour un texte d’une tout autre nature, qui ne met pas en jeu la souveraineté nationale mais les fondements même de notre société, un texte qui a l’ambition, comme l’a dit Madame Le Garde des Sceaux, de réformer la civilisation, que je viens, avec une voix dont j’ai bien conscience qu’elle n’est pas aussi forte que celle de Philippe Seguin, mais avec une gravité comparable à la sienne vous demander de voter cette motion de rejet préalable, conformément à l’article 91 alinéa 5 du règlement de notre Assemblée.

    Nous sommes dans un régime parlementaire.
    La Vème République est un régime parlementaire.

    Mais il arrive que sur des sujets d’une importance exceptionnelle, sur des textes d’une nature particulière, le choix du référendum ne soit pas une simple option mais une obligation : une obligation politique, une obligation intellectuelle, une obligation morale, même si elle n’est pas une obligation juridique.

    La constitution offre la possibilité au Président de la république de faire voter le peuple au lieu du Parlement, 
    elle ne le lui impose pas.

    Aussi, ce n’est pas la lettre mais l’esprit de nos institutions qui est ici en cause.

    Nous pourrions, nous devrions, au moins nous accorder sur un point, c’est que ce projet de loi est d’une nature très différente de celle des projets qui sont d’habitude soumis au Parlement. 

    Nous pourrions, nous devrions au moins nous entendre sur un fait : que par son objet même, par les conséquences qu’il peut avoir, par la profondeur des sujets auxquels il touche, ce projet de loi n’est pas un projet de loi ordinaire.


    Mes chers collègues, 

    Vous le savez tous, dès lors que ce projet de loi serait adopté tout retour en arrière serait très difficile, pour ne pas dire impossible. Non parce qu’il serait entré dans les mœurs, non parce que ceux qui aujourd’hui le rejettent – et avec quelle force – s’y seraient habitués, non pour des raisons politiques mais pour des raisons juridiques et pour des raisons humaines.

    C’est une loi que l’on ne peut pas prendre à l’essai : si elle était adoptée, des couples se marieraient, des enfants naitraient. Comment dès lors imaginer revenir sur ce qui aurait été accompli ? Comment concevoir que la parole qui aurait été donnée à ces couples, à ces enfants puisse être reprise ? Mais de ce fait, ce que la majorité d’aujourd’hui déciderait, aucune majorité dans l’avenir ne pourrait le défaire.

    Or, aucune majorité n’a le droit de dessaisir les majorités futures, c’est la loi d’airain de la démocratie !

    Quand une décision quasiment irréversible doit être prise, seul le peuple souverain a le droit de la prendre. 

    C’est la loi de la République !

    Ce texte touche à la conscience de chacun. En évoquant l’éventualité d’une « clause de conscience » pour les Maires, le Président de la république lui-même l’a reconnu.

    Et il appartient, aujourd’hui,  à notre Assemblée, à chacun d’entre nous, de répondre, en conscience, à la question de savoir si nous avons le droit, je dis bien le droit, en tant que Démocrate, en tant que Républicain de parler ici à la place de ceux que nous représentons, si nous avons le droit, oui le droit, de substituer sur un tel sujet notre conscience à la leur. 

    C’est la question de la République qui se trouve posée. 

    La République ne peut vivre que si chaque conscience républicaine est une conscience inquiète se demandant, à chaque instant, si elle n’utilise pas avec excès les pouvoirs qui lui ont été confiés, si elle exerce avec suffisamment de retenue l’autorité qu’on lui a octroyée.

    Tous ceux qui sont chargés de faire fonctionner les institutions de la République doivent se rappeler sans cesse que quels que soient les droits, les pouvoirs dont ils disposent, ils n’ont, en vérité, que des devoirs.

    La République ne va jamais aussi mal que lorsque cette exigence faiblit dans le cœur et la raison de ceux qui la servent. Et voyez comme elle va mal notre République. Combien elle a besoin de retrouver les vertus qui dans le passé lui ont donné tant de force.

    Alors c’est à chaque conscience républicaine, inquiète de savoir où est son devoir que je m’adresse. Je veux lui dire que l’on aurait pu s’y prendre autrement : recenser les inégalités, les injustices, les souffrances et chercher tous ensemble, comme pour la loi bioéthique, une réponse commune afin de régler les problèmes d’héritage, de pension, et même répondre à la demande de reconnaissance d’un amour qui mérite autant de respect, de considération que toutes les autres formes d’amour.

    La majorité ne l’a pas souhaité. Elle a voulu que la conclusion soit écrite par avance, irrévocablement, avec l’ouverture du mariage aux couples de même sexe. Avec ce paradoxe que ceux qui, dans le passé, ont tant décrié le mariage veulent aujourd’hui l’offrir à tous.

    Dès lors que ce choix avait été fait, il ne pouvait plus y avoir de véritable débat. Un débat dont la conclusion est écrite d’avance, n’est pas un vrai débat. C’est un simulacre.

    Si le Président de la République restait sur sa position,
    Si la majorité ne changeait pas d’avis, le peuple serait deux fois bafoué :
    La première parce qu’il n’aurait pas son mot à dire,
    La deuxième parce qu’on l’aurait privé du débat par lequel il aurait pu se forger son jugement.

    Mais est-il bien raisonnable de croire qu’à notre époque il est encore possible de tenir le peuple à l’écart de décisions qui conditionnent aussi irrévocablement son avenir ?

    Est-il bien raisonnable de croire qu’une loi votée de cette manière - qu’il faut considérer pour ce qu’elle serait, c’est-à-dire un passage en force – pourrait devenir la loi de tous dans les consciences et dans les cœurs ? 

    Quand on viole les consciences, quand on les piétine, elles se raidissent, elles se ferment.

    Regardez ce qui se passe dans la société, regardez les déchirures : On ne crée pas de l’ouverture d’esprit, de la tolérance et mieux que de la tolérance, de la compréhension, du respect, de la fraternité par la brutalité aveugle de la loi.

    Pourquoi ne pas admettre enfin que la loi ne peut pas tout régler quand c’est dans l’intimité de la conscience de chacun que se trouve la réponse ? 

    Pourquoi ne pas reconnaitre qu’il y a toujours dans une société des zones grises où les sentiments et les raisons sont si enchevêtrées que la loi en cherchant à les trancher fait plus de mal que de bien ?

    En parlant du mariage pour tous, le gouvernement dit : 
    Amour ! 

    Mais qui sur ces bancs conteste à deux êtres qui s’aiment le droit de s’aimer ?

    Le gouvernement dit :
    Liberté ! 

    Mais qui sur ces bancs conteste à quiconque la liberté de vivre selon son cœur ?

    Le gouvernement dit :
    Égalité des droits ! 

    Mais le mariage n’est pas un droit, c’est une institution.

    Le gouvernement dit :
    Progrès ! 

    Nous lui opposons la sagesse multimillénaire que toutes les sociétés humaines ont tirée de l’expérience de la vie.

    Le million de Français qui est descendu dans les rues de Paris le 13 janvier, parlant pour des millions et des millions d’autres qui n’avaient pu venir, n’a pas manifesté contre l’amour, ni contre la liberté, ni contre l’égalité des droits, ni contre le progrès.

    Il a manifesté pour défendre une institution aussi ancienne que la civilisation. Il a manifesté parce que dénaturer cette institution, ce serait bouleverser l’ordre social pour tout le monde, pas seulement pour quelques-uns.

    La plupart de ceux qui sont opposés à ce projet, n’ont ni moins de cœur, ni moins de générosité que ceux qui le soutiennent. Ils ne sont pas moins dignes de respect. Ils savent que la société a changé, que les mentalités ont évolué, que la famille s’est transformée. Ils portent sur le monde un regard bienveillant. Ils ne veulent blesser personne. On avait dit qu’il y aurait des débordements, des outrances.

    Il n’y en a pas eu une seule !

    À ces Français simples et dignes qui ne demandent au fond qu’un peu de respect, de démocratie et de République n’allons-nous répondre que par ces deux mots terribles : Taisez-vous ! 

    Qui peut croire que c’est possible ? Qui peut croire que cela ne laisserait pas de trace ?

    Taisez-vous ! 

    Qui peut croire que la République n’en sortirait pas blessée ?

    Mes chers collègues, non seulement nous avons à nous prononcer sur un sujet qui n’est au fond, nous le savons bien, comparable à aucun autre, mais nous avons à le faire dans un de ces moments de l’histoire très particuliers, où la politique se voit sommée de redonner un sens aux mots de Civilisation, de civilité, de civilisé.

    Dans quelle société, dans quelle civilisation voulez-vous nous faire vivre ? Voilà la question que dans des périodes de malaises et de crises profondes, quand un vieux monde n’arrive pas à mourir et qu’un nouveau n’arrive pas à naître, tous les peuples du monde adressent à tous les pouvoirs et d’abord bien entendu à la politique. Question légitime si l’on veut bien considérer la politique comme l’expression de la volonté humaine dans l’Histoire.

    Avec ce texte, nous n’avons pas à prendre position seulement sur une mesure,
    pas seulement sur un droit,
    pas seulement sur un statut,
    nous discutons d’un texte qui est bien davantage qu’un texte : une déclaration d’intentions sur la manière dont nous allons faire évoluer notre société, sur les principes sur lesquels elle se construira, sur les valeurs qu’elle reconnaitra comme siennes. 

    Nous avons à prendre position sur une politique de civilisation. Oui, une politique de civilisation.

    Qu’y a-t-il derrière ce texte sinon d’abord la négation de la différence des sexes et dans le domaine où elle est la plus évidente : celui de la procréation et de la relation à l’enfant ?

    Ouvrir le mariage aux couples de même sexe, c’est donner le droit d’avoir des enfants à des couples auxquels la loi de la nature ne le permet pas.

    Il ne faut pas tricher avec cette question, il ne faut pas se mentir à ce sujet, c’est un sujet trop grave.

    Il n’y a pas d’un côté le mariage et de l’autre côté la procréation et l’enfant.

    Dès lors que l’on touche au mariage, on implique l’enfant.

    Dès lors que l’on touche au mariage, on pose inéluctablement la question de la procréation.

    Dès lors que l’on touche au mariage, on ne peut pas éviter les conséquences sur la filiation.

    Et qu’est-ce que cela signifie de vouloir donner un véritable « droit à l’enfant » à des couples de même sexe sinon d’abord que l’on est convaincu qu’il n’y a aucune différence entre le père et la mère.

    Qu’il y ait des préjugés sociaux dans la répartition des tâches entre les hommes et les femmes au sein la société, qui le nierait ?

    Mais que les relations de l’enfant avec son père ou avec sa mère ne soient que l’expression des préjugés sociaux, quelle idée folle ! Qui donc a aimé de la même manière son père et sa mère ? Qui donc a été aimé de la même manière par son père et par sa mère ?

    Il faut l’homme et la femme, le père et la mère, pour engendrer et guider l’enfant sur le chemin de la vie. C’est une loi de la nature. Une loi qu’aucune loi humaine ne peut abolir. Les accidents de la vie en décident parfois autrement. Et chacun s’en sort du mieux qu’il peut. Mais pensez toujours, oui pensez toujours, aux souffrances intimes, aux blessures secrètes de tous ceux auxquels, malgré l’amour infini qu’ils ont reçu de ceux qui les ont élevés, il a manqué et il manque toujours, pour la vie, une mère ou un père.

    Et à ceux qui prétendent que les enfants des couples de même sexe apprendront la différence des sexes en regardant autour d’eux ce qui se passe dans la société, je voudrais dire qu’ils semblent ignorer à quel point la prise de conscience pour un enfant qu’il est différent des autres est toujours, pour lui, une source de douleur.

    J’ai parlé, un jour, de la souffrance de l’enfant sans père ou sans mère qui devait répondre aux questions : 
    profession du père, profession de la mère ?

    Madame le Ministre de la famille m’a répondu que l’on ne faisait pas de la politique à partir d’un cas personnel. Mais on ne fait pas de politique non plus sans qu’elle soit profondément ancrée dans l’expérience d’une vie, les épreuves affrontées, les peines et les joies ressenties. 

    À la politique sèche et froide des idéologues, il faut sans cesse opposer la politique charnelle, la politique humaine. Si vous lisiez toutes les lettres que j’ai reçues de Français connus et inconnus, vous sauriez qu’en vous parlant de moi, j’ai parlé pour tous ceux qui ont vécu le même drame intime souvent sans en parler jamais.

    Mesdames les Ministres, vous vous défendez - et avec quelle énergie - de vouloir faire disparaitre les mots de mère et de père du Code Civil mais votre dessein est de les faire disparaitre de la société. Voilà la vérité, vous qui ne croyez pas qu’il y a des différences entre l’une et l’autre.

    Les racines idéologiques de votre projet sont décidément très profondes : vous ne voulez pas seulement que l’homme domine la nature. Vous voulez que le social triomphe de la nature et que sa victoire soit sans partage. 

    Vous tournez le dos à la raison. Car c’est la déraison qui commande à l’homme de vouloir nier sa nature. 

    Où cela nous mènerait-il sinon sur les voies les plus dangereuses ?

    Ce texte n’est pas qu’un texte : s’il était adopté, il aurait des conséquences. Voulez-vous réellement les conséquences de ce que vous voulez instaurer ?

    Croire que la question du mariage peut être dissociée de celle de la procréation médicale assistée et de celle de la procréation pour autrui, c’est se mentir à soi-même. Cette dissociation est impossible.

    Si l’on donnait le droit à des couples par nature stériles d’avoir des enfants, on ne pourrait leur refuser les moyens d’en avoir. On finirait donc, et une partie de la majorité ne s’en cache pas, par donner accès à la procréation assistée à tous les couples de femmes. 

    Madame le Ministre de la famille m’a dit : la PMA qui est autorisée pour les couples hétérosexuels qui souffrent d’un problème de stérilité crée déjà pour ces couples un « droit à l’enfant ».

    Mais dans le cas des couples hétérosexuels, il s’agit seulement d’aider à l’accomplissement de la loi de la nature. Dans le cas de couples de même sexe, il s’agirait, au contraire, de s’affranchir de cette loi. Cela changerait tout. Ce serait faire passer la procréation assistée du champ médical où elle est étroitement contenue dans celui du social. Ce serait ne plus regarder la procréation que sous le seul angle du désir.

    Une mère m’a écrit ces quelques mots : « mon mari et moi avons des jumelles de 14 ans issues de PMA à partir de mes gamètes et de celles de mon mari. Je ne juge pas les couples qui font appel à un don de spermatozoïdes mais c'est de tout autre nature. Il y a un vrai déséquilibre dans le couple : c'est l'enfant biologique d'un seul des parents. Je crois que ça peut poser des soucis aux enfants surtout si l'enfant ne sait pas que son père n'est pas le père biologique. Et si cette loi passe, nous allons fabriquer des milliers d’enfants.

    Après, disait-elle, c'est l'amour qui compte. »

    C’est l’amour qui compte…..

    Mais qu’allons-nous faire de l’amour dans cette histoire ? 

    Il est bien difficile pour n’importe quel parent d’élever des enfants et je suis bien certain que deux femmes ou deux hommes peuvent donner autant d’amour qu’un père et une mère. Les deux femmes qui m’ont élevé m’ont aimé sans compter. Mais que deviendrait l’amour lorsque ayant donné aux femmes les moyens d’exercer ce droit à l’enfant, on ne pourrait pas le refuser indéfiniment aux hommes : on leur concéderait  les mères porteuses à moins que ce ne soient les juges qui le fassent. Au nom de cette exigence d’égalité à laquelle le projet de loi qui nous est présenté prétend répondre. Alors s’installerait, fatalement, une relation de client à fournisseur en matière de procréation, la marchandisation des corps, la demande par les clients d’enfants sans défaut, d’enfants qui leur ressemblent…. Devant certains tribunaux dans le monde, on débat déjà pour savoir si l’intérêt de l’enfant doit primer sur le contrat ou l’inverse.

    Après, c’est l’amour qui compte….

    Mais que deviendrait l’amour alors dans cette relation marchande, dans cet asservissement des corps des plus pauvres ? Dans cette société qui en tout et pour tout ferait passer le plaisir et l’utilité devant tout autre considération, et où serait occultée la dimension spirituelle de l’enfant, de la personne humaine ?

    Je veux parler à tous ceux d’entre vous qui, sur tous les bancs de cette Assemblée, n’ont pas renoncé à l’idéal de la République.

    Ne voient-ils pas que cette société serait à l’opposé de l’idéal que nous ont légué les Lumières et 20 siècles de civilisation ?

    Quel modèle, quel repère pourrions-nous donner alors à nos enfants, à nos petits-enfants ? Que leur dirions nous à chaque fois qu’ils nous interpelleraient par ces mots si fréquents dans leur bouche : « à quoi cela me sert-il ? En quoi cela me procure-t-il du plaisir ? Alors que l’enfant lui-même ne serait plus qu’un obscur objet du désir ?

    Comment trouverions-nous les mots pour dire à nos enfants que les plus grandes satisfactions de l’homme sont dans la récompense des efforts qu’il consent sur lui-même, dans les exigences qu’il s’impose à lui-même, dans les principes et dans les règles qui le grandissent en lui fixant des limites.

    Comment pourrions-nous encore dire à nos enfants qu’entre la recherche du plaisir le plus immédiat et le plus superficiel et l’utilitarisme le plus étroit, ils ne trouveraient qu’une vie médiocre ?

    Quel  Républicain ne voit qu’entre l’égalitarisme qui est le principe de cette loi et le communautarisme qui en est l’impensé, il n’y a pas de place pour la République ? Quel Républicain ne comprend qu’en faisant de la revendication de quelques-uns aussi légitime, soit-elle la loi de tous, on fait le contraire de la République.

    À tous ceux qui parlent de conservatisme à propos des hommes et des femmes qui s’inquiètent que le pas qu’on veut leur faire franchir soit un pas de trop, une conscience républicaine ne devrait-elle pas répondre que si la République c’est l’audace d’inventer l’avenir, ce n’est pas, pour autant, l’oubli de toutes les leçons de l’Histoire humaine ? 

    À tous ceux qui exigent que l’on dise oui à leur réforme au nom soi-disant du progrès, une conscience républicaine ne devrait-elle pas répondre que « seul l’esclave dit toujours oui » ?

    Oh certes, une telle société peut advenir même sans la dénaturation du mariage. Mais avec ce projet de loi, 
    nous lui ouvrons grand la porte,
    nous l’appelons,
    nous rendons son avènement quasiment inéluctable.

    Aucune conscience républicaine ne peut rester indifférente à ce danger. C’est le rôle, c’est le devoir, c’est la nature même d’une conscience républicaine d’être inquiète des conséquences des choix que nous nous apprêtons à faire.

    Je m’adresse donc à toutes les consciences républicaines que compte cette Assemblée, qu’elles soient de droite, qu’elles soient du centre ou qu’elles soient de gauche : 

    Comment trancher entre les consciences qui ne sont pas suffisamment inquiètes de ce projet de loi et celles qui, peut-être, le sont trop ?

    Comment trancher sinon en permettant à chaque Français de prendre part à la décision ?

    Mes chers collègues, je voudrais que chacun d’entre vous, avant de décider, s’il vote pour ou contre cette motion, mesure bien l’importance de sa décision, non seulement pour le présent mais aussi pour l’avenir.

    Car nous devons nous demander de quelle manière nous allons répondre à toutes les grandes et graves questions de société et de civilisation que toutes les crises que nous vivons vont nous obliger à affronter dans les années qui viennent. 

    Les aborderons-nous en faisant prévaloir la seule logique des majorités parlementaires, la seule logique des camps et des partis ?

    C’est une question de morale, mais pas seulement car comment rendrons nous acceptables, légitimes – et cette légitimité est indispensable – les règles et les principes au nom desquels nous acceptons de vivre ensemble et de partager – ce n’est pas rien – une destinée commune, si la seule logique qui prime toujours est celle du rapport de force ?

    Je ne dis pas cela pour contester la légitimité de la majorité parlementaire - de celle-ci pas plus que d’une autre - à gouverner. C’est la loi de la Démocratie, je l’ai toujours respectée.

    Je le dis parce qu’il est des moments et il est des sujets qui appellent chacun à suivre sa conscience davantage que son parti.
    Ce moment en est un.
    Ce sujet en est un.

     

    Mes chers collègues, 

    En 1984, François Mitterrand avait imposé contre le souhait de son gouvernement et d’une partie de sa majorité le retrait du projet de loi sur l’école, non parce qu’il avait peur de la rue mais parce qu’il ne voulait pas rouvrir une guerre scolaire dont il se souvenait le mal qu’elle avait fait à la France.

    En 1992, il avait répondu à la grande voix de Philippe Seguin en prenant le risque du référendum et du débat. Il avait compris qu’il fallait prendre ce risque pour que la monnaie unique soit la monnaie de tous.

    À chaque fois, François Mitterrand ne s’était pas abaissé dans son rôle de chef de l’Etat. Il s’était grandi. 

    On se grandit toujours quand on donne la parole au peuple.

    Il reste quelques semaines au Président de la République pour méditer les leçons de son prédécesseur.

    Mais aujourd’hui, c’est à nous de décider pour nous-même.

    Nous pouvons décider que c’est au peuple et non à nous de trancher.

    Si notre Assemblée fait ce choix, elle ne diminuera pas en prestige, elle ne ruinera pas son autorité : elle les renforcera.

    Personne ne se reniera,
    Personne ne se déshonorera.

    Au contraire, chacun d’entre nous aura redonné du sens au beau nom de « représentant du peuple ».

     

    Mes chers collègues,  

    Je vous ai parlé pour l’avenir, et c’est pour l’avenir que vous allez décider.

    Un dernier mot, Madame le Ministre de la famille : non, je n’aurai pas honte quand mes enfants, mes petits enfants liront les mots que j’ai utilisé dans ce débat avec le souci constant de ne blesser personne mais la conviction profonde que le combat contre la société que ce texte appelle est légitime.


    Projet de loi ouvrant le mariage aux couples de personnes de même sexe
    Intervention d’Henri GUAINO, Député des Yvelines,
    Pour la motion de rejet préalable
    Mardi 29 janvier 2013

  • Tugdual Derville invité par Louis Daufresne

    Lien permanent

    Louis Daufresne, dans son émission Le Grand Témoin, s'entretient avec Tugdual Derville, le 28 janvier 2013.

    La Vaillante retranscrit en trois vidéos l'entretien radiophonique, plus une quatrième de l'éditorial du jour.


    1ère partie/3

     Tugdual Derville (interviewé par Louis Daufresne), extraits :

    « La nécessité pour nous est de manifester un profond respect des personnes et ce profond respect ne peut être manifesté que si au fond de nos êtres nous sommes dans une non-violence intérieure. »

    « Cela me fait penser à une société adolescente qui récuse tout ce qui peut poser des limites, limites nécessaires à la vie en société, les dures limites qui constituent la condition humaine aussi, et qui nous permettent, si nous nous limitons nous-mêmes, de respecter les plus faibles. Parce que la démocratie c'est la loi du plus faible qui l'emporte sur la loi du plus fort, sinon il n'y a pas besoin de loi. Effectivement, ceux qui posent des limites sont brutalisés. Mais ça ne veut pas forcément dire qu'ils ne sont pas entendus. Les parents le savent bien : à certains moments, l'adolescent vomit sa famille (et c'est, d'une certaine manière, une façon pour lui de s'exprimer, c'est peut-être nécessaire). Et à un moment donné l'adolescent reconnaît que cette autorité a construit l'exercice de sa propre liberté. »

    « La France est un pays où nous nous divisons parfois très fortement. C'est aussi un pays où le peuple se rebelle lorsque le pouvoir entre dans la toute-puissance, avec d'énormes risques. On n'a pas tout à fait les mêmes risques que dans d'autres périodes révolutionnaires, mais j'ai noté que certains quotidiens italiens avaient parlé de « Révolution française ». Effectivement, ce projet de loi est dans la toute-puissance : il vient nier un repère fondamental, celui de l'engendrement, celui dont nous sommes tous issus, tous nés d'un homme et d'une femme. Et ce qui couvait sous la cendre, le feu de résistance qui couvait sous la cendre a éclaté le 13 janvier. Face à cela, c'est vrai, il y a une idéologie de la toute-puissance qui refuse toute forme de limites et qui ne sait même pas elle-même où elle nous conduit, si nous ne résistons pas. Elle l'ignore. Mais les conséquences peuvent être extrêmement graves pour l'anthropologie, pour l'humanité des années à venir. Et c'est cela qui aujourd'hui nous mobilise. »



     

    2cde partie/3

     Tugdual Derville (interviewé par Louis Daufresne), extraits :

     « La France n'a pas à se limiter au « moins disant » éthique, c'est l'expression du Conseil d'État. Autrement dit : la France est le pays des droits de l'homme, c'est vrai. C'est un pays où il y a de vrais débats de société, contrairement à la Belgique ou à la Hollande. Nos amis belges et hollandais nous ont dit : « C'est incroyable, chez nous c'est passé comme une lettre à la poste, on n'a même pas pensé résister ! ». Et donc, moi je suis fier que dans notre pays tant de manifestants se soient levés et certains pour la première fois de leur vie, indépendamment des générations. Alors voilà : l'inéluctabilité qu'on nous impose c'est une figure de dialectique. Comme s'il y avait un sens de l'histoire. Moi, ce que je dirais plutôt, c'est que dans l'histoire de l'humanité on tâtonne d'abord, en matière d'éthique, on fait parfois n'importe quoi, et progressivement la conscience humaine vient au secours d'une science qui pouvait être sans conscience, et petit à petit, nous révisons nos comportements. Le sens de l'histoire pour moi c'est l'humanisation du regard de l'homme sur l'homme, c'est le respect croissant pour le plus petit, le plus faible. On voit que le bébé est considéré comme une personne désormais, et heureusement ; on voit que la lutte contre la maltraitance a fait d'énormes progrès ; que nous continuons d'inventer en matière de solidarité sociale, humaine, des façons de faire tout à fait nouvelles et inédites, très créatives et pleines, oui, j'ose le dire, d'amour. Sur ce sujet aussi [le projet de loi Taubira « Le mariage pour tous »], le tâtonnement c'est aujourd'hui, peut-être, mais demain, je l'espère, et c'est pour cela que nous travaillons, les générations futures seront préservées de l'effacement d'un repère très précieux, celui de l'engendrement que nous devons leur léguer. »

     

     

     

    3ème partie/3

    Tugdual Derville (interviewé par Louis Daufresne), extraits :

    « Beaucoup de français ignorent encore que derrière ce slogan de « mariage pour tous » c'est l'adoption d'enfants que nous confierions (notre société) à deux hommes ou deux femmes, les privant par-là même d'un père ou d'une mère alors qu'ils ont été eux-mêmes endeuillés. »

    « J'aime beaucoup discuter (avec les adversaires), j'ai beaucoup de respect pour les adversaires qui se mobilisent. Parce que je sais qu'ils y croient au plus profond. Il y a quelque chose de très profond dans leur revendication. Mais je vois aussi que cette revendication est à la fois irrépressible, d'un certain côté, et sans limites. « Il ne faut pas croire qu'on va s'arrêter là ! ». Plus on donne et plus le besoin de reconnaissance, au fond, risque de nous entraîner loin. Et vous l'entendez parfois dans certains groupes, qu'ils demandent beaucoup plus. Il y a le mariage religieux, bien sûr, et bien d'autres choses encore. Et ce « mariage » entre personnes de même sexe aboutit à des situations de parentalité multiples. Certains demandent déjà : « Pourquoi pas trois ? », comme au Brésil, « le mariage civil à trois ». Non pas que soient conscients de la transgression ceux qui la revendiquent, mais ils nous font entrer dans un système de « sans limites ». »




    Édito de Gérard Leclerc

    « Les médias, qu'on le veuille ou non, sont les vecteurs consentants d'une certaine culture qui nous a menés justement à ce projet de loi. »



     

     

  • Une supercherie linguistique doublée d’un mensonge

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    « Le mariage pour tous »

    Une supercherie linguistique doublée d’un mensonge

    Dans le concert des arguments développés par les « pour » et les « anti » mariage gay, il est une voix qu’on n’a jamais entendue : celle de la langue française.

    Au cours de mes 40 années d’enseignement (collège et lycée) en qualité de professeur de Lettres Classiques, j’ai toujours attaché une grande importance à la valeur des mots. Choisir le mot exact, le « polir sans cesse » comme disait Boileau, c’est à la fois s’assurer qu’il exprime parfaitement ce que l’on veut dire mais c’est aussi s’assurer que l’on sera bien compris de son auditoire. 

    La polémique que suscite le projet de loi sur le mariage gay offre un bel exemple de cette dilution de la pensée dans le brouillard d’une terminologie approximative. A force de triturer les mots dans tous les sens, les mots n’ont plus de sens et l’opinion déboussolée y perd son latin. Les slogans réducteurs répercutés par les médias ne font qu’entretenir la confusion au point qu’on a parfois l’impression d’avoir perdu le sens commun.

    Prenons quelques exemples :

     

    Premier exemple : La notion de « couple » homosexuel est-elle adaptée ?

    La réponse est non.

    Si l’on se réfère à la terminologie du « Bon Usage », l’assemblage de deux éléments de même nature ne constitue pas un « couple » mais une « paire ». Ainsi, on dira une paire de ciseaux, une paire de lunettes et non un couple de ciseaux ou un couple de lunettes. Il en est de même pour les êtres vivants. Deux bœufs assemblés sous le même joug forment une paire de bœufs et non un couple de bœufs. Deux jumeaux de même sexe  constituent une paire de jumeaux et non un couple de jumeaux. On pourrait multiplier les exemples.

    La langue française nous indique clairement que la notion de « couple » repose sur un principe de différenciation et d’altérité. Le couple, c’est « un homme et une femme unis par des relations affectives, physiques » (Robert 2012). La prise en compte de la fin de la définition ne doit pas faire oublier le début. La distorsion sémantique à laquelle on s’adonne chaque fois qu’on évoque  un « couple » homosexuel crée une confusion dommageable que rien ne peut justifier, pas même une évolution des mœurs. Il s’agit bien ici d’appeler un chat « un chat ».

     

    2ème exemple : qu’est-ce qu’un parent ?

    La reconnaissance officielle du « couple » homosexuel entraîne nécessairement – tout le monde le  sait - une modification du Code Civil. La disparition des mots « père » et « mère » au profit de la notion de « parent 1 » et « parent 2 » n’est en fait qu’une supercherie linguistique doublée d’un mensonge puisque le mot désigne étymologiquement les deux personnes (père et mère) qui conjointement sont à l’origine de toute naissance. En latin, le verbe parere veut dire « engendrer » pour le père, et « enfanter » pour la mère. Comment peut-on expliquer à un enfant que ce mot de « parent » (quel que soit son numéro) s’applique à une personne qui est totalement étrangère à sa naissance, un clandestin en quelque sorte ? La loi peut-elle cautionner ce mensonge ?

    Ces deux exemples suffisent à démontrer que la terminologie avancée par les partisans de la loi n’est qu’un écran de fumée destiné à masquer une stratégie plus sournoise que les récentes manifestations viennent d’ailleurs de confirmer. Il semble en effet que les partisans du « mariage pour tous » se soient déjà engouffrés dans une brèche : l’incohérence du projet de loi : 

     

    Une incohérence interne à la loi 

    Un « couple » homosexuel est par définition stérile. Il est donc logique que les homosexuels aient recours à des artifices s’ils veulent avoir des enfants. C’est le sens de leur revendication première : le droit à l’adoption, baptisé outrageusement « droit à l’enfant ». Le projet de loi prévoit cette disposition mais interdit la PMA (procréation médicalement assistée pour les femmes) et la GPA (gestation pour autrui pour les hommes c’est-à-dire le recours possible à une mère porteuse). Comment justifier cette contradiction alors que la loi du « mariage pour tous » est présentée comme une extension des droits ? Les récentes manifestations des partisans du mariage ont clairement démontré que les homosexuels entendaient s’appuyer sur cette contradiction pour pousser plus loin leurs exigences. Sur cette question, on note les premiers signes d’un fléchissement de la part des promoteurs de la loi. Le recours à la PMA, exclue dans un premier temps, pourrait faire l’objet d’un amendement présenté par les députés de la majorité. Cette concession, logique en ellemême, met à nu la vraie nature du débat. Le « mariage pour tous », présenté au départ comme l’objectif essentiel, apparaît de plus en plus clairement comme un simple point de passage, une étape transitoire pour obtenir « in fine » une égalité de droit pleine et entière avec les couples hétérosexuels stériles. 

    Comme le droit à l’adoption ne changera pas grand-chose à la situation des homosexuels, vu les réticences de la plupart des états à confier des enfants à des homosexuels, c’est bien sur la PMA et la GPA que se concentre toute la pression. Une fois  acquis le droit à la PMA pour les femmes homosexuelles, comment interdire aux hommes, au nom de ce même principe d’égalité, d’avoir recours à la GPA ? Si c’était le cas, il y aurait là une discrimination incompréhensible, voire une injustice, tout à fait contraire à l’esprit même du projet de loi.

     

    Le piège des slogans

    Il est une autre supercherie linguistique qu’il convient de dénoncer et qui tient au discours même des homosexuels. Pendant longtemps, leur combat a été placé sous le signe du « droit à la différence », droit qui leur a été reconnu par l’ensemble de la communauté nationale avec la création du PACS. Aujourd’hui, le thème du « droit à la différence » a totalement disparu du glossaire homosexuel. Bizarre ! Ce virage à 180 degrés a quelque chose de surprenant et pourtant personne ne s’en étonne. 

    Il est vrai que le slogan « le mariage pour tous » est plus rassurant et plus rassembleur que « le droit à la différence » jugé sans doute trop « clivant » pour employer un terme à la mode, un concept dépassé en tout cas que l’on range sans complexe au rayon des accessoires. Au contraire, « le mariage pour tous » sonne comme un appel à la fête, à la fusion universelle de toute l’humanité, un remake d’ « Embrassons-nous, Folleville », en somme une préfiguration du « paradis pour tous ». Qui peut résister à un tel programme ?

    Malheureusement, cette vision édénique du mariage est en décalage complet avec la réalité des faits. Il est d’abord étrange que le PACS ait eu si peu de succès auprès de la communauté homosexuelle alors que cet aménagement de la législation était notamment prévu pour elle. Et si le mariage présente tant d’attraits, comment expliquer que tant d’hommes et de femmes, de la base jusqu’au sommet de l’Etat, choisissent l’union libre c’est-à-dire le non-mariage ?

    Il est notable également que nombre d’homosexuels vivent leur vie le plus naturellement du monde sans réclamer nécessairement le passage devant Monsieur le Maire. Certains même s’étonnent de ce déchaînement médiatique sur une question qui leur est totalement étrangère.

    Alors, au bout du compte, que penser de tout ce tapage, de tout ce galimatias ?

    Pas grand chose, sinon que derrière ces acrobaties sémantiques ou stylistiques, il y a la volonté de nier une évidence.

     

    La négation d’une évidence

    Quel que soit le mode de procréation choisi, la naissance d’un enfant est nécessairement le résultat de la rencontre de deux cellules, masculine et féminine. La différenciation sexuelle est constitutive de l’être humain, même si les choix de vie peuvent ensuite amener certains individus à la vivre différemment. De ce fait, on ne peut admettre qu’une simple évolution des mœurs  soit un argument suffisant pour modifier le statut du couple et celui de la famille, tels qu’ils nous ont été transmis depuis les origines de notre civilisation. Les Romains eux-mêmes, qui pratiquaient librement et indifféremment  les deux formes de sexualité, n’ont jamais songé à remettre en question ce mode d’organisation de la famille pour une raison très simple mais essentielle : cette structure de la cellule familiale est la seule à garantir la filiation. Grands législateurs (ne pas oublier au passage que notre Code Civil découle directement du Droit Romain), ils ont toujours tenu à préserver ce socle de l’organisation sociale. Quant à l’adoption, très courante à Rome, elle a toujours été soigneusement encadrée par tout un arsenal juridique de manière à préserver l’intégrité des liens du sang. De ce fait, l’adoption n’était juridiquement admise que dans le cadre d’une famille déjà constituée et sur le modèle du couple hétérosexuel.

     

    Jamais deux sans trois

    Mais il y a plus grave : la stérilité naturelle du « couple homosexuel » induit nécessairement l’intervention d’un tiers de l’autre sexe pour le rendre fécond. Dès lors, l’accès à la PMA ou à la GPA (quelle que soit la procédure adoptée, c’est-à-dire avec ou sans rapport sexuel) conduit à s’interroger sur la nature de ce prétendu « couple » qui ne peut assurer à lui seul  son désir d’enfant. Ce qui revient à dire que le contrat de mariage que signeraient deux personnes de même sexe inclut nécessairement l’intervention prévisible d’une troisième personne. Il ne s’agit donc plus d’un « couple » mais d’une « triade », une forme d’adultère biologique accepté et reconnu par la loi. Sans parler des inévitables dérives financières qu’entraînera nécessairement la recherche effrénée de donneurs et de mères porteuses. Dans certains pays, on assiste déjà à des combinaisons multiples où les homosexuels s’adjoignent - pour un temps ou pour longtemps et moyennant finances – le concours d’une ou plusieurs personnes pour mener à bien leur projet. Nous sommes là devant le risque majeur d’une marchandisation de l’enfant et par extension de la vie humaine. L’embryon devient un objet de convoitise assimilable à n’importe quel produit de consommation. Dans un proche avenir, on peut même  imaginer l’achat en pharmacie de paillettes de sperme ou d’ovules congelées qu’on pourrait se procurer aussi facilement que la pilule contraceptive ou le Viagra, le tout remboursé par la Sécurité Sociale, au nom de ce « droit à l’enfant » brandi comme un dogme par les partisans de la loi.

    Au terme de cet argumentaire, une conclusion s’impose :

     

    Le « mariage » pour quelques-uns est en fait une menace « pour tous »

    A l’évidence, l’adoption de ce projet de loi fait courir à notre société un danger d’autant plus grand qu’il est paré de toutes les vertus aux yeux du plus grand nombre. Pour employer le langage des internautes, c’est un dangereux «cheval de Troie» qu’on introduit dans la législation française. « Malheureux  citoyens, quelle folie est la vôtre ! » s’écriait Laocon en voyant les Troyens disposés à introduire ce cheval maudit dans les murs de leur ville (Enéide, II, 42).

    Abandonné sur la plage, ce cheval imaginé par Homère avait tous les attraits d’un cadeau des dieux.  
    Les Troyens sont restés sourds à l’avertissement de Laocoon. Ils ont fait mieux. Pour faciliter l’entrée du cheval dans la ville, ils n’ont pas hésité à abattre une partie de leurs murailles. 

    On connaît la suite ! … 

    Il est vain d’imaginer qu’on puisse contenir toutes les dérives inhérentes au projet de loi tel qu’il est présenté aujourd’hui. C’est bien sur la notion même de « mariage pour tous »  qu’il faut se battre et résister. Si cette digue saute, le risque de submersion est hors de tout contrôle.

     

    Daniel Godard 
    Professeur de Lettres Classiques

     

    Dans le cortège des partisans de la loi « le mariage pour tous », il y avait un slogan intéressant : « UNE PAIRE DE MERES VAUT MIEUX QU’UN PERE DE MERDE ». Si l’on accepte de faire l’impasse sur le caractère outrancier et injurieux du propos, ce slogan est une aubaine!
    Pour la première fois, l’union de deux femmes est reconnue comme une « paire » et non comme « un couple ».
    J’y vois la confirmation (involontaire) de mon analyse du mot « couple ».
    Les arguments en faveur du mariage homo s’effondrent d’un coup devant cette évidence.

    Merci à celui ou à celle qui est à l’origine de ce slogan lumineux et providentiel !

  • Chorégraphie pour un dépliant

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    Voulons-nous transmettre

    la confusion des genres

    aux générations naissantes ?

  • Le 13 janvier 2013 à 19h24

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  • Une loi comme suicide symbolique pour la société

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    « Livré au droit à la toute-puissance sur la vie que nous accorde un consensus social coupé de toute référence à l'Origine de la vie, nous entrons dans un monde où la rencontre sexuelle peut être dissociée de la parole donnée dans une alliance, et en même temps abstraite de son rapport à la génération humaine. Un monde où la sexualité pourrait s'exercer sans qu'il n'y ait personne d'engagé, où la succession de rencontres sans parole donnée, je ne sais plus qui je suis, ni pour qui. Un monde "sans engagement de votre part", dirait la publicité.
     
        Il n'est alors pas surprenant que dans un monde où la question de l'Origine et de la fin de l'humanité ne se pose plus et n'éclaire donc plus la vie et la génération humaine, nous en arrivions donc à pouvoir considérer qu'une loi politique puisse reconnaître l'union homosexuelle comme un mariage. Or, une telle reconnaissance légale ne constitue rien de moins qu'un suicide symbolique pour une société. En effet les juristes s'accordent pour dire que le fondement de la loi, dans toute société humaine, renvoie à l'Origine de la vie à travers la différence sexuelle et la succession des générations. Reconnaître comme mariage légal un comportement qui nie le fondement même de la loi, c'est bien le signe d'une société déboussolée, où toute loi n'a plus pour fondement que le sentiment de chacun et la statistique des sondages. Et l'on entendra dire, par exemple, pour défendre l'homoparentalité, que les homosexuels peuvent avoir autant de bonté et de tendresse que d'autres pour élever des enfants. C'est sûr, mais ce n'est pas la question.
     
        La question est celle de la vérité de la vie dans son rapport à l'Origine, et cette vérité n'est pas réductible au seul sentiment que j'ai de la vie, fût-il sincère. Cette Vérité est Autre, tout en m'étant intérieure. Elle est source d'une loi intérieure dont je ne suis pas l'Origine. Mais, à partir du moment où la question de l'origine et de la vie humaine est mise entre parenthèses, il ne nous reste plus que le développement, par ailleurs légitime, de la science, pour éclairer notre jugement sur la vie et finalement fonder les lois de nos sociétés.
     
        Nous risquons alors d'oublier que la recherche scientifique ne s'applique qu'au fonctionnement de la vie, de la nature, de l'univers, s'interdisant, par méthode, de s'interroger sur l'origine d'un tel fonctionnement. Que la nature soit le signe ou nom d'une Présence qui, à travers elle, s'adresserait à l'homme, ne peut être l'objet de la recherche scientifique moderne, qui a d'autant plus progressé dans son champ opératoire qu'elle a renoncé à y intégrer cette question. »
     
     
    Michel FARIN in En enfer, il n'y a personne, Éditions Lessius, 2011

  • Le mariage gay ou la dictature de la confusion

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                La question du mariage gay appelle dix remarques :


              I) Il importe d’abord de distinguer la question de l’homosexualité de celle du mariage gay. L’homosexualité appartient à la sphère privée et renvoie à une histoire singulière. C’est ainsi, il y a des personnes dans la société dont la manière d’aimer consiste à aimer une personne du même sexe. Pourquoi en est-il ainsi ? Nous n’en savons rien et nous ne le saurons sans doute jamais, tant il y a de raisons possibles à cela. Toujours est-il qu’il s’agit là d’une réalité que la société se doit de respecter en offrant aux couples homosexuels une protection de leur vie privée au même titre que celle dont peut jouir chaque citoyen.


              II) Le mariage gay relève en revanche d’une question qui regarde tout le monde, celui-ci étant appelé à bouleverser de manière irréversible la norme en vigueur en établissant une nouvelle norme en matière de famille, de filiation et de transmission, s’il vient à être adopté.


              III) À l’origine, le mariage est une donnée naturelle. C’est ainsi, pour faire naître la vie un homme et une femme s’unissent et procréent un enfant. En établissant le mariage comme institution, la société a donné un cadre juridique à cette donnée naturelle afin de la protéger.



              IV) Il s’avère qu’aujourd’hui le mariage, la filiation et la transmission ont changé de sens. La procréation n’est plus l’unique sens du mariage, le mariage-sentiment ayant tendance à l’emporter sur le mariage-procréation. De même, l’enfant n’a plus pour unique sens d’être le fruit de l’union d’un couple, le désir d’enfant introduisant des demandes d’enfants de la part de personnes seules ou des demandes d’adoption ou de procréation assistée de la part de couples stériles.


              V) La question qui se pose dès lors et qui concerne tous les couples, qu’ils soient hétérosexuels ou homosexuels, est celle de savoir si le sentiment doit devenir l’unique sens du mariage et si le désir d’enfant d’où qu’il vienne doit devenir la raison d’être de ce dernier. Elle est également le fait de savoir si ce qui se fait doit devenir la norme de ce qui est.

              Si tel est le cas, il faut savoir que rien ne va pouvoir s’opposer formellement à ce qu’on lève désormais l’interdit de l’inceste au nom du droit de s’aimer pour tous. Le sentiment en dehors de toute donnée naturelle devenant la norme, au nom de l’amour un père pourra réclamer d’épouser sa fille voire son fils, une mère son fils voire sa fille, une sœur son frère ou sa sœur, un frère sa sœur ou son frère.

              Si tel est le cas, tout étant noyé dans l’amour érigé en droit au-dessus de toute réalité, plus personne ne sachant qui est qui, il y aura fatalement une crise d’identité et avec elle un problème psychique majeur. Les tendances psychotiques générées par l’individualisme hédoniste pour qui le réel n’existe pas et ne doit pas exister vont se renforcer. Un père étant aussi un amant et une mère une amante, il va devenir impossible de parler de père et de mère et donc de savoir qui a autorité pour élever des enfants. En ce sens, la famille va littéralement exploser.

              Enfin, l’interdit de l’inceste étant levé, c’est le sens même du devenir de l’être humain qui va être atteint, le sens de cet interdit étant de rappeler aux êtres humains qu’ils sont faits pour devenir, en épousant, non seulement un autre hors de sa famille mais aussi de son sexe et non pour demeurer dans la même famille et le même sexe.

              En ce sens, le législateur qui va devoir se prononcer sur le mariage homosexuel a de lourdes responsabilités. S’il décide de faire du mariage une affaire de droit et de sentiment en dehors de toute donnée naturelle, il introduira dans la cité la ruine possible de l’identité psychique, de la famille ainsi que du devenir symbolique de l’être humain.


              VI) Au-delà de cette question qui concerne tout le monde, les hétérosexuels comme les homosexuels, la question du mariage gay pose un certain nombre de questions qu’il importe d’examiner avec attention, la principale d’entre elle étant celle du même. Au nom de l’égalité et du refus d’établir des discriminations, est-il possible d’établir une équivalence entre tous les couples ? Trois éléments s’y opposent.


              VII) En premier lieu, pour une simple question de réalité et de donnée objective, on ne peut pas mettre sur le même plan hétérosexualité et homosexualité, un homme et une femme n’étant pas la même chose que deux hommes et deux femmes. Les couples hétérosexuels ne sont pas des couples homosexuels ni les couples homosexuels des couples hétérosexuels. Établir une équivalence entre les deux revient à nier la réalité en opérant une grave confusion entre genre et pratique.

              Avant d’être une pratique, l’hétérosexualité est un genre et pas une pratique, alors que l’homosexualité est une pratique et non un genre. La preuve : pour être homosexuel, il faut d’abord être homme ou femme. Si demain, au nom de l’égalité, tout est mis sur le même plan, la pratique particulière dictant ses lois au genre, un processus dangereux va s’engager à savoir celui de la disparition à plus ou moins long terme de la différence sexuée. On va alors assister à un effet dictatorial. Pour que les homosexuels puissent exercer leur droit à l’égalité, l’humanité va être interdite de faire une différence entre homme et femme, voir dans l’hétérosexualité un fondement et non une pratique étant considéré comme une pratique discriminatoire. Une nouvelle humanité va voir alors le jour. Nous vivions jusqu’à présent dans un monde marqué par la différence. Nous allons connaître un monde nouveau fondé sur l’indifférenciation. Quand on sait que la différence est le propre du vivant et l’indifférencié le propre de la mort, un principe de mort va désormais servir de principe pour guider l’humanité.


              VIII) La difficulté soulevée par l’équivalence décrétée entre tous les couples se retrouve au niveau des enfants. Comme il semble qu’on l’ait oublié, il importe de rappeler qu’un couple homosexuel ne peut pas avoir d’enfants. On peut le déplorer, mais c’est ainsi, deux hommes et deux femmes ne peuvent pas procréer. Ceci veut dire que, pour qu’il y ait procréation l’homme a besoin de la femme et la femme de l’homme.

              Les homosexuels réclament de pouvoir avoir un enfant. Ils se fondent pour cela sur le droit qui est accordé aux couples hétérosexuels d’adopter ou de procéder à une procréation médicalement assistée. Ils oublient ou font semblant d’oublier que ce n’est pas le droit qui les empêche d’avoir un enfant mais la Nature.

              Certes, un couple hétérosexuel peut adopter ou passer par la procréation assistée afin d’avoir un enfant. Il importe de souligner toutefois qu’un enfant adopté par un couple hétérosexuel n’a pas et n’aura jamais le même sens qu’un enfant adopté par un couple homosexuel. Lorsqu’un couple hétérosexuel adopte un enfant, il le fait pour pallier un problème de stérilité. Lorsqu’un couple homosexuel veut adopter un enfant, il le fait pour contourner une impossibilité. Le registre symbolique n’est pas le même, vouloir contourner une impossibilité à l’aide d’une loi nous situant dans le domaine de la fiction prométhéenne et non plus dans celui de la réalité humaine.

              Jusqu’à présent, la rationalité de la société repose sur la notion de limite et avec elle sur l’idée que tout n’est pas possible. Tout ne se décrète pas. Tout ne se fabrique pas. Limite positive autant que protectrice, l’idée que tout ne se décrète pas nous préservant de la dictature du Droit et l’idée que tout ne se fabrique pas nous préservant de la dictature de la Science. Avec le mariage gay et l’ouverture à la possibilité pour couples gays de recourir à l’adoption ainsi qu’à la procréation médicalement assistée, il va en être autrement.

              L’idée que rien n’est impossible va voir le jour en enterrant la notion de limite. Voyant le jour, plus rien ne va nous protéger de la dictature du Droit et de l’idée que tout peut se décréter. Plus rien ne va nous protéger de la dictature de la Science et de l’idée que tout peut se fabriquer. On obéissait la Nature qui, comme le dit Montaigne, est « un doux guide ». Nous allons désormais obéir à la Science et au Droit. La Nature évitait que l’Homme n’obéisse à l’Homme. Désormais, l’Homme va obéir à l’Homme sans que l’Homme n’obéisse à quoi que ce soit. Dostoïevski au 19e siècle comme Léo Strauss au 20e siècle voyaient dans le « Tout est possible » l’essence du nihilisme. Ils redoutaient comme Nietzsche que celui-ci n’envahisse l’Europe en ne se faisant aucune illusion cependant à ce sujet. Avec le mariage gay, l’adoption et la procréation assistée pour couples gays, le « Tout est possible » va devenir une réalité et, avec lui, le nihilisme sous la forme du triomphe sans partage de la Science, du Droit et de l’Homme.


              IX) Dans le même ordre d’idées, il importe de distinguer un enfant que l’on fait d’un enfant que l’on fait faire. Quand un couple fait un enfant, l’enfant est une personne. Le fait de faire un enfant se passant entre des personnes qui s’aiment et pour qui l’enfant n’est pas une marchandise ni l’objet d’un trafic. Quand on fait faire un enfant par un tiers, l’enfant n’est plus une personne, mais un objet voire une marchandise dans un trafic. Témoin le fait de louer le ventre d’une mère porteuse ou les services d’un géniteur.

              Lionel Jospin faisait remarquer qu’il n’y a pas un droit à l’enfant, mais un droit de l’enfant. Si le mariage gay avec procréation assistée est adopté, le droit de l’enfant va être sacrifié au profit du droit à l’enfant. Sous prétexte de donner un droit à l’enfant aux homosexuels, l’enfant considéré comme objet n’aura plus droit symboliquement au statut de personne. Alors que le monde des droits de l’homme s’efforce de lutter contre la réification de ce dernier, au nom du droit à l’enfant, on va réifier ce dernier.

              Il va y avoir en outre des questions pratiques à gérer. D’abord le coût. Pour qu’un couple d’hommes puisse avoir un enfant, il va falloir louer le ventre d’une mère porteuse. Ce qui n’est pas donné, le prix moyen se situant entre 80.000 et 100.000 euros. Comme les couples gays vont réclamer que lafacture soit réglée par la Sécurité Sociale au nom du droit à l’enfant pour tous et de l’égalité, comment celle-ci va-t-elle faire pour faire face à cet afflux de dépenses au moment où son déficit se creuse ? Qui va payer et comment ?

              Par ailleurs, l’État prenant en charge les mères porteuses, il va falloir aller chercher celles-ci ou bien créer un service spécial. L’État se refuse à devenir un État proxénète en autorisant et en organisant le trafic du sexe de la femme. Pour que la procréation médicalement assistée puisse exister, il va falloir qu’il devienne quelque peu trafiquant et qu’il organise le trafic des ventres. Ce qui ne va pas être une mince affaire. Quand un couple ne sera pas content du bébé d’une mère porteuse et qu’il décidera de le rendre, que va-t-on faire ? Obliger le couple à garder l’enfant ? En faire un orphelin ? Payer la mère porteuse pour qu’elle le garde ? Et qui payera le psychiatre qui devra soigner l’enfant ainsi ballotté et quelque peu perturbé ?


              X) Ce problème rencontré dans le fait de faire faire un enfant va se retrouver avec celui de l’éduquer. Une chose est d’avoir un père et une mère, une autre d’avoir deux pères et deux mères. Obliger un enfant à naître et à grandir dans un couple homosexuel va se confondre avec le fait d’interdire à un enfant de savoir ce qu’est le fait d’avoir un père et une mère. A-t-on le droit d’enlever ce droit à un enfant ? Si tel est le cas, cela voudra dire que pour que les homosexuels aient droit à l’égalité les enfants des couples homosexuels seront condamnés à ne pas être des enfants comme les autres.

              Certes, les orphelins n’ont pas leur père ou leur mère. Mais, il s’agit là d’un accident et non d’une décision. Avec le droit pour couples gays d’avoir un enfant, les orphelins ne seront pas le produit d’un accident de la vie mais d’une institutionnalisation délibérée. Ils seront obligés par la société de n’avoir soit pas de père, soit pas de mère.

              À cette situation qui ne manquera pas de produire à un moment ou à un autre des mouvements de révolte s’adjoindra une autre difficulté. L’enfant de couples gays n’aura pas droit à une origine réelle, mais à une origine absente. À la case père ou mère il y aura un blanc. Ce qui n’est pas simple à porter. Qu’on le veuille ou non, l’enfant ne pourra pas ne pas se sentir coupable, la propension naturelle des enfants étant de se culpabiliser quand l’équilibre familial n’est plus respecté.

              En conclusion, les partisans du mariage gay, de l’adoption et de la procréation médicalement assistée pour couples gays rêvent quand ils voient dans ce projet un progrès démocratique sans précédent. Ils croient que tout va bien se passer. Cela ne va pas bien se passer. Cela ne peut pas bien se passer pour la bonne raison que tout a un prix.

              Ne croyons pas que l’on va remettre la différence sexuée en voyant en elle une pratique parmi d’autres sans que cela ait des conséquences. N’imaginons pas que des enfants fabriqués, à qui l’on aura volé leur origine, seront sans réactions. Ne pensons pas que la disparition des notions de père et de mère au profit de termes comme parent I ou parent II permettront l’existence d’une humanité plus équilibrée et mieux dans sa peau.

              On prétend résoudre des problèmes par ce projet de loi. On ne va pas en résoudre. On va en créer. Le 20e siècle a connu la tragédie du totalitarisme et notamment du projet insensé de créer un homme nouveau à travers une race ou une classe. Ne cédons pas à la tentation de fabriquer un homme nouveau grâce à la Science et au Droit. Tout ne se décrète pas. Tout ne s’invente pas. Il existe des données naturelles de la famille. N’y touchons pas. Ne jouons pas avec le feu. Ne jouons pas à être des apprentis sorciers. Le Tao voit dans la complémentarité entre le féminin et le masculin une loi d’équilibre dynamique fondamentale de l’univers. Ne touchons pas à cette loi d’équilibre.

              Nous avons tous des amis homosexuels que nous respectons, que nous estimons et que nous aimons. Qu’ils soient d’une profonde moralité, nous n’en doutons pas. Qu’ils soient capables d’élever un enfant, nous n’en doutons pas non plus. Qu’un enfant puisse être plus heureux dans un couple homosexuel que dans certains couples hétérosexuels, nous n’en doutons pas une fois encore. Que cela soit une raison pour légaliser le mariage gay et permettre l’adoption ou la procréation médicalement assistée pour couples gays, c’est là une erreur.

              Une chose est une loi, une autre est un cas particulier. On ne fait pas une loi avec des cas particuliers, mais à partir d’une règle tenant compte de tout ce qu’il y a derrière. S’agissant du mariage gay avec adoption et procréation médicalement assistée, il y a derrière une telle règle trop de choses dangereuses et graves pour que celle-ci puisse devenir une loi allant dans le sens des intérêts fondamentaux de l’être humain.

              La Gauche a le pouvoir à l’assemblée et peut décider de passer en force grâce au nombre de ses voix et ce afin de paraître de gauche. Elle peut choisir de préférer la Gauche à l’être humain. Elle s’honorera de choisir l’être humain plutôt que la Gauche, sachant qu’en servant l’être humain elle est sûre de servir ses propres intérêts alors que l’inverse n’est pas sûr. Tant il est vrai que l’on n’a jamais intérêt à scandaliser l’honnête homme en l’obligeant à devoir se soumettre par la contrainte à ce que sa raison répugne à accepter par respect pour la raison.

              Le mariage gay qui nous propose une grande noyade collective dans l’amour n’est pas raisonnable. La mise en question de la distinction entre homme femme ravalée au rang de pratique sexuelle n’est pas raisonnable. Vouloir avoir un enfant à tout prix en recourant soit à l’adoption, soit à un père donateur, soit à une mère porteuse n’est pas raisonnable. Ne plus parler de père et de mère mais de deux pères ou de deux mères n’est pas raisonnable. En un mot, bidouiller une famille grâce à un montage juridico-médical et appeler cela famille n’est pas raisonnable. Les mots ont du sens quand ils renvoient à une réalité. Quand ils ne sont plus que ce que l’on décide qu’ils doivent être, on n’est plus dans le domaine du sens, mais de la confusion. Le règne de la confusion, sa dictature et avec elle la confusion des esprits et des comportements, n’est-ce pas ce dont nous souffrons déjà et qui risque de nous engloutir ? Est-il besoin d’en rajouter ?


    Bertrand VERGELY