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« Cher(e)s ami(e)s, depuis le début de mon engagement, je n’ai eu de cesse de répéter que je suis homosexuel et pas gay. Si je précise de nouveau cela, à l’occasion du bilan de notre grenelle de la Famille, c’est que cette distinction n’est en rien une subtilité linguistique de ma part. Elle revêt une réalité qui est la cause de ce qui s’est passé hier aux États-Unis, ce qui se passe aujourd’hui en France, et ce qui se passera demain dans toute l’Europe, contre la Famille. Le lobby gay est déterminé à détruire, et peut importe les moyens, les institutions du mariage et de la famille ; aidée en cela par certains lobby féministes, comme les femen, mais pas seulement.
Après la loi Taubira pour le mariage entre personnes de même sexe voici que maintenant risque d’arriver les conséquences directes de celle-ci, la PMA et la GPA.
Le désir d'enfant, et je le sais, est une réalité sincère et douloureuse, mais nous homosexuels, nous n’avons pas à demander, pour autant, à la société de bricoler quelque chose pour transformer cette réalité-là
Mais revenons un instant sur un des multiples mensonges de la loi Taubira. Je veux parler de l’adoption.
Les couples hétérosexuels ont déjà bien du mal à pouvoir adopter un enfant. Il existe très peu de pupilles de la Nation qui le soient. Ces couples doivent alors se diriger la plupart du temps vers des pays d’Afrique ou d’Amérique Latine.
Il est peut-être utile de rappeler que dans ces pays, leur convention rejette toute adoption par des parents de même sexe. Et aujourd’hui, certains d’entre eux ferment même leur frontière pour les couples hétérosexuels.
L’enfant n’a pas à être traité comme un cobaye. Il n’a pas à s'adapter à une dictature « Homo-parentale ».
Le gouvernement, à force de vouloir faire des lois et des concessions pour le lobby gay, fait de l’apartheid non seulement vis-à-vis des autres citoyens, mais plus encore vis-à-vis des homosexuels eux-mêmes. Et je dis bien de l’apartheid, c’est-à-dire une politique ultra-minoritaire et communautariste à l’encontre d’une majorité de Français.
Pour faire croire qu’un homme avec un homme ou une femme avec une femme pouvait avoir un enfant, on nous impose l’idéologie du genre. On nous dit mensonge lorsqu’on l’évoque.
Nous avons beau brandir « Papa porte une robe », « Tango a deux papas » ou bien encore « Jean a deux mamans », on nous dit que nous sommes d’affreux réactionnaires.
N’ayons pas peur de dire haut et fort que des enfants endoctrinés par des théories féministes ne seront en rien demain des personnes libres, mais des esclaves bien plus que le machisme qu’elles sont censées combattre.
Une Nation construite ainsi ne pourra adhérer qu’aux idées les plus ridicules et les plus aberrantes et cela avec la même servilité.
J’aimerais faire une comparaison hasardeuse, mais en réalité je ne le pense pas.
Le 4 décembre 2013, la majorité a adopté une loi pénalisant les clients de prostitués.
Si la GPA passe au détour de la PMA, est-ce que le fait de se servir du corps d’une femme contre rémunération ne sera-t-il pas considéré comme un acte du coup répréhensible par la loi ?
Ce n’est pas seulement moi qui m’interroge ainsi, mais la ministre des droits de la femme elle-même quand elle a dit devant l’Assemblée nationale, je cite :
« La détresse de l’un ne se soigne pas par l’exploitation de la détresse de l’autre. Elle n’est jamais une justification… Depuis quand notre pays admettrait-il que la liberté aille au-delà de ce qui ne nuit pas à autrui ? Depuis quand privilégierions une souffrance par rapport à une autre ? Depuis quand le corps humain devrait-il être assimilé à un médicament ? Depuis quand se soignerait-on aux dépens d’une autre personne. »
Pour une fois, vous avez raison Madame la Ministre.
Enfin, pour conclure, je voudrais dire comme je l’avais déjà dit, il y a un an à la même date à Tours, il est quand même incroyable qu’en ce 8 mars, journée de la Femme, que cela soit un homme qui plus est homosexuel qui défende l’intégrité de la Femme.
Lorsque je vois que ce sont des femmes elles-mêmes qui veulent exploiter la misère d’autres femmes, je me dis dans quel monde vit-on ? Femmes réveillez-vous ! Indignez-vous comme aurait dit Stéphane Heissel. »
Jean-Pier Delaume-Myard Porte-Parole de La Manif Pour Tous
Grenelle de la Famille 8 mars 2014 Mutualité de Paris
Comment une Secrétaire d’État m’a demandé de me taire
Par Jean-Pier Delaume-Myard, porte-parole national de La Manif Pour Tous, auteur de "HOMOSEXUEL contre le mariage pour tous"
Le 28 avril 2014, la Secrétaire d’État à la Famille et aux Personnes âgées, Laurence Rossignol, a reçu une délégation de La Manif Pour Tous, dans le cadre de ses rencontres avec des associations familiales ou des mouvements citoyens. Une rencontre que nous avions réclamée de longue date et que la Ministre en charge de ce dossier du précédent gouvernement avait toujours refusé.
Comme le 25 janvier 2013, lors de l’entrevue avec Monsieur le Président de la République, je faisais partie de la délégation, mais j’ai été reçu, cette fois-ci, beaucoup moins courtoisement, la Secrétaire d’État m’a demandé purement et simplement de me taire.
La délégation autour de Ludovine de la Rochère, Présidente, était composée de quatre personnes, Jérôme Brunet, Porte-parole de L’Appel des professionnels de l’enfance et de La Manif Pour Tous, Albéric Dumont, Coordinateur général de La Manif Pour Tous, Anne-Claude Venot, porte-parole des Adoptés pour l’enfance, mouvement du collectif de La Manif Pour Tous et de moi-même.
Avant la conclusion de Ludovine de la Rochère, je fus le dernier à prendre la parole.
J’eus à peine le temps de commencer de donner mon point de vue : « Je représente de nombreux homosexuels - hommes et femmes, qui sont contre la loi qui a ouvert le mariage entre personnes de même sexe. En leurs noms, je vous remercie de me recevoir car nous avons eu, jusqu’ici, l’impression que l’on nous volait notre voix.
Madame la Ministre vous avez appelé à l’apaisement. Nous ne pouvons que nous en réjouir.
Cependant, dès le mois de mai, débuteront dans toute la France, les gay pride 2014. Et je m’en inquiète fortement en tant que porte-parole de La Manif Pour Tous, mais aussi en tant qu’homosexuel.
Je m’en inquiète en tant que porte-parole de la Manif Pour Tous car je ne voudrai pas que vous écoutiez les sirènes de la LGBT qui vont, réclamer, à cors et à cris, à cette occasion, l’obtention de la PMA et ses dérives directes, la GPA. »
Paradoxalement, alors que je l’avais remercié, quelques instants plus tôt, de nous donner (nous homosexuels) la parole que la Secrétaire d’État me demandait si « je souhaitais vraiment poursuivre ».
Pour Madame Rossignol, il n’était pas question de revenir sur la loi Taubira. En outre, elle-même, ainsi que le Premier Ministre et Madame Marisol Touraine, ministre des Affaires Sociales et de la Santé, avaient été très claires, « il n’y aura pas de PMA sous cette mandature et pas plus d’amendement » de qui que se soit ; pas plus de madame Esther Benbassa, Sénatrice EELV, qui pour la Secrétaire d’État lorsqu’on lui a fait part de notre inquiétude quant à son souhait de déposer un article, nous a affirmé qu’ « elle était seule à avoir cette position ».
Lorsque je retentai de prendre la parole pour indiquer que « des associations gays comme l'Association des Parents et futurs parents Gays et Lesbiens » souhaitaient la « voir reprendre l'accès à la PMA à toutes les femmes, en couples ou célibataire, le statut du beau-parent, la reconnaissance de la pluriparentalité, et la reconnaissance des états civils étrangers des enfants nés par GPA. »
Que je poursuivis, en rappelant que « la circulaire Taubira » inquiétait « également La Manif Pour Tous. Cette circulaire signifie la régularisation, en France, d'enfants qui seraient nés, entre guillemets, illégalement. Mais, Madame la Ministre comme vous le savez tout enfant-né, par exemple, sur le sol américain est américain. Cette circulaire introduit en réalité un premier pas vers la légalisation de la GPA et la mercantilisation de l'enfant ce qui est pour nous totalement insupportable. »
La Secrétaire d’État a affirmée, alors que cette circulaire fait actuellement l’objet, depuis plusieurs mois, d’un recours devant le Conseil d’État, qu’elle « faisait partie à part entière de la Loi Taubira ».
Puis, elle ignora la suite de mes propos souhaitant aborder les futures propositions de la Loi Famille dont la première devrait passer dès le mois de mai en commission des lois.
Alors que la Secrétaire d’État demande l'apaisement avec les associations contre le mariage homosexuel, elle commence fort mal, du moins avec un des représentants homosexuels.
On verra bien, si Madame Rossignol demandera à la LGBT de se taire sur la PMA, on verra bien si Madame Rossignol demandera à Madame Esther Benbassa, Sénatrice EELV, de se taire au Sénat.
Si le gouvernement ne veut plus attendre parler de la Loi Taubira et de la PMA, pourquoi alors ne demande-t-il pas au Comité Consultatif National d’Éthique de se dessaisir de la demande du Président de la République de donner un avis sur la PMA ? Pourquoi ne demande-t-il pas à Madame Taubira de retirer sa circulaire qui introduit une suspicion quant à la GPA ?
Enfin, si la Secrétaire d’État ne souhaite plus que soit abordé la question de la PMA, condition très clairement sine qua non pour être de nouveau reçu, pourquoi laisser alors l’adoption dans la loi ouvrant le mariage pour personnes de même sexe, puisque tout le monde sait que l’adoption pour des couples homosexuels est pratiquement impossible, la majorité des conventions des pays autorisant l’adoption l’interdisant pour les homosexuels… il faudra, donc, bien qu’un jour ou l’autre, face à la pression des associations gays ce gouvernement traite de nouveau la question de la PMA.
Pour l’heure, circulez il n’y a rien à voir. Taisez-vous, Jean-Pier… Delaume-Myard.
« Qu’est-ce qu’une famille ? On peut s’étonner que nous soyons ici, ensemble, à poser cette question, et certains ne manqueront pas de croire que notre démarche ne pourra que conduire soit au ressassement de choses banales, soit à la complication de choses simples. Nous n’aurions pas d’autre alternative, avec une telle question, que d’enfoncer des portes ouvertes ou de couper les cheveux en quatre.
En même temps, on le devine, les premières évidences se cachent toujours dans leur lumière. Ce n’est pas seulement comme le nez au milieu de ma figure, trop proche pour être vu ; ni comme le paysage cent fois retraversé, tellement connu qu’il s’efface. C’est surtout comme une source qui éclaire et fonde les autres choses, mais qui ne peut pas, dès lors, être elle-même fondée ni éclairée. Devant cette source, nous sommes semblables à des oiseaux de nuit qui voudraient regarder le soleil en face.
Nous provenons tous d’une famille, nous commençons tous avec un nom de famille, nous avons tous eu une certaine famille pour berceau. La famille est un fondement. Or, si elle est un fondement, on ne saurait « fonder la famille ». Si elle se situe au principe de nos vies concrètes, il devient impossible de la justifier ou de l’expliquer, parce qu’il faudrait recourir à un principe antérieur, et la famille ne serait plus qu’une réalité secondaire et dérivée, non pas une matrice. Les théoriciens qui voudraient que la première communauté humaine fût issue d’un contrat passé entre individus asexués et solitaires, déclarent eux-mêmes qu’il s’agit là d’une fiction, d’une hypothèse de travail, et non d’une réalité[1]. Il n’y a pas, au niveau humain, de principe antérieur à la famille. On ne peut donc pas l’expliquer ni la justifier, on peut seulement expliciter sa présence qui nous devance toujours.
Et c’est pourquoi ceux qui attaquent la famille dans son évidence sont si difficiles à contester. Expliquer que l’homme descend du singe est plus facile que d’expliquer qu’un enfant descend d’un homme et d’une femme, parce que dans le premier cas, la thèse réclame effectivement des explications, et même des explications nombreuses, alors que dans le second, il n’y rien à expliquer, il ne s’agit même pas d’une thèse, mais d’un donné absolument initial, comme l’existence du monde extérieur. Or comment prouver que le monde extérieur existe ? Comment montrer à quelqu’un que le soleil éclaire ?
Et pourtant le soleil manifeste les couleurs et, par là, indirectement, se manifeste. Et la famille, dont nous avons à parler, manifeste et se manifeste. On a beau contester, cela se manifeste. Et cela ne se manifeste pas que dans les rues, cela se manifeste en nous, dans nos culottes, si j’ose dire, qu’on le veuille ou non, cela se manifeste aussi bien à l’église que dans une soirée LGBT, cela se manifeste par la barbe d’un capucin aussi bien que par la poitrine d’une Femen. Pour que cela ne se manifeste plus, il faudrait être un ange.
Cette manifestation est si irrésistible que nous assistons depuis quelques décennies, de la part de ceux-là même qui voulaient se débarrasser la famille, à un étrange retour du refoulé familial. Ceux qui dénonçaient la famille comme l’institution répressive et oppressive de base, veulent à présent faire de l’enfant le produit d’une manipulation génétique (puisque l’égalité réclame que deux femmes ou deux hommes puissent également en avoir avec leurs propres gamètes), ce qui est aller bien au-delà de l’oppression ou de la répression, puisque c’est courir vers une fabrication pur et simple, et faire despotiquement de l’enfant, l’objet d’un planning, la réalisation d’un fantasme, et plus encore un cobaye de laboratoire. Cette contradiction prouve qu’on ne peut déconstruire le naturel, mais seulement construire à côté son simulacre, comme on ne fabrique une intelligence artificielle que d’après le peu que l’on a compris de l’intelligence humaine.
Qu’est-ce donc qu’une famille ? Les gens les mieux intentionnés à son égard insistent sur certains éléments de définition. J’en retiendrai trois : 1° La famille est d’abord le lieu du premier amour. Il est fondamental que les parents s’aiment et que l’enfant soit aimé, sans quoi la famille ne peut que se dessécher ou se décomposer. 2° La famille est le lieu de la première éducation. L’enfant y naît à partir d’un projet parental responsable, où l’on songe à son futur, à son édification, à sa qualification avec la plus grande compétence possible. 3° La famille humaine est aussi un lieu de respect des libertés. Les parents s’y sont unis par un contrat, et, à travers leur mission éducative, ils contribuent, non à renforcer la dépendance, mais à promouvoir l’autonomie de l’enfant.
Nous insistons souvent sur ces caractéristiques, parce que nous songeons au bien de l’enfant. Mais ce faisant nous manquons l’essence de la famille, et, alors même que nous pensons la défendre, nous fourbissons les armes qui permettent de l’attaquer. À trop se préoccuper du bien de l’enfant, on oublie l’être de l’enfant. À trop s’attarder sur les devoirs des parents, on oublie l’être du père et de la mère. Les éléments que nous venons de proposer, amour, éducation, liberté, disent tout sauf l’essentiel, à savoir que les parents sont les parents, et l’enfant est leur enfant.
Et voilà le conséquence fatale : en prétendant fonder la famille parfaite sur l’amour, l’éducation et la liberté, ce qu’on fonde, en vérité, ce n’est pas la perfection de la famille, mais l’excellence de l’orphelinat. Cela ne fait aucun doute : dans un excellent orphelinat, on aime les enfants, on les éduque, on respecte leur personne. On y est même en quelque sorte dans la plénitude du projet parental, puisque prendre soin des enfants est le projet constitutif d’une telle entreprise.
Ne considérer la famille qu’à partir de l’amour, de l’éducation et de la liberté, la fonder sur le bien de l’enfant en tant qu’individu et non en tant qu’enfant, et sur les devoirs des parents en tant qu’éducateur et non en tant que parents, c’est proposer une famille déjà défamilialisée. Car on pourra toujours vous dire qu’un père et une mère peuvent être moins aimants, moins compétents et moins respectueux que deux hommes ou deux femmes, et certainement moins efficace que toute une organisation composée des meilleurs spécialistes. Cette organisation d’individus compétents pourra passer pour la meilleure des familles, et la meilleure des familles s’identifiera au meilleur des orphelinats.
Pourquoi manquons-nous si facilement l’essence de la famille ? Parce que le principe de la famille est trop élémentaire, trop humble, trop animal en apparence, et donc honteux (ne parle-t-on pas de « parties honteuses » ?). Vous avez compris, le principe de la famille est dans le sexe. Même quand il s’agit d’une famille adoptive, même quand il s’agit d’une famille spirituelle, où le père est un père abbé, et les frères sont des moines, les pures et hautes dénominations qu’on emploie viennent d’abord de la sexualité. Les noms du père et du fils s’énoncent à partir de ce fondement sensible qui est notre fécondité charnelle.
C’est parce qu’un homme a connu une femme, et que de leur étreinte, par surabondance, ont jailli des enfants, qu’il y a ces noms de famille, ces noms de père, de mère, de fils, de fille, de sœurs et de frères. Le mot qui achève la devise républicaine : « fraternité » procède lui-même du sexe et de la famille naturelle. Quant aux fameuses théories du genre, qui croient pouvoir affirmer que la masculinité et la féminité ne sont que des constructions sociales, elles s’appuient elle aussi sur la différence des sexes, sans lesquels l’idée même du masculin ou du féminin ne nous viendrait pas à l’esprit.
La famille est donc d’abord le lieu où s’articulent la différence des sexes et la différence des générations, ainsi que la différence de ces deux différences. La différence des sexes, à partir de la fécondité propre à leur union, engendre la différence des générations, et cette différence des générations n’a rien d’analogue avec la différence des sexes. L’interdit fondamental de l’inceste nous le signal, mais aussi le fait que lorsque l’homme s’unit à sa femme, il ne cherche pas d’abord à avoir un enfant, il cherche d’abord à s’unir à sa femme, et l’enfant advient, comme un surcroît.
La famille noue ainsi cinq types de liens : conjugal (de l’homme et de la femme), filial (des parents aux enfants), fraternel (des parents entre eux), à quoi s’ajoutent deux autres que l’on oublie souvent, et qui sont pourtant décisif pour l’inscription historique et déjà politique de la famille. D’abord, le lien des grands-parents aux petits-enfants, qui permet de tempérer l’influence des parents, et d’ouvrir le temps de la famille à celui de la tradition[2]. Il y a encore un cinquième type de lien que tend à occulter l’idéal du couple mais que ne manque pas de rappeler la belle-mère, je veux parler du lien avec la belle-famille – ce que l’on pourrait appeler la « théorie du gendre ». Avec lui, l’alliance conjugale se double d’une alliance pour ainsi dire tribale, et ouvre l’espace de la famille à celui de la société.
Or la particularité de ces liens familiaux, c’est qu’ils ne se fondent pas d’abord sur une décision, mais sur un désir, c’est qu’ils ne viennent pas d’abord d’une convention, mais d’un élan naturel. Bien sûr, le désir doit y être assumé dans la décision (ou plutôt le consentement), et la nature s’y déploie à travers des aspects conventionnels. Mais il y va d’abord de quelque chose qui nous traverse, une donation, qui vient de l’autre et va à l’autre, et donc dépasse nos calculs. Cela nous emporte plus loin que nous-mêmes, plus loin que nos projets individuels (qui peut former le projet d’avoir une belle-mère ?), parce que cela nous ouvre à l’autre sexe et à l’autre génération, parce que cela nous intéresse à un temps qui n’est déjà plus le nôtre.
Disons-le simplement : aucun calcul ne peut avoir pour résultat une naissance. Personne ne peut se dire honnêtement : « Ça y est, je suis prêt, je suis assez mûr, assez compétent pour avoir un enfant, je sais parfaitement comme il faut s’y prendre pour en faire un homme accompli, j’ai le droit souverain de le faire venir au monde et d’être son maître. » Comment donc pourrions-nous avoir le droit d’élever un enfant, quand nous sommes nous-mêmes si bas, quand nous ne comprenons pas le mystère de la vie ?
Il ne s’agit donc pas d’un droit, mais d’un fait. L’enfant advient selon un don de la nature, et de ce don nous ne sommes jamais vraiment dignes. Il est le surcroît d’un amour sexuel, et non le résultat d’une visée directe. Car aucune assurance humaine, technique ou morale, ne peut être légitimement à l’origine de sa venue. Si sa présence relevait de notre compétence, alors nous le dominerions absolument, il serait un rouage dans un dispositif, une étape dans un projet, et non l’événement de la vie qui commence et toujours nous dépasse. Lorsqu’un enfant lance à ses parents : « Je n’ai pas choisi de naître », les parents peuvent toujours lui retourner la politesse : « Nous non plus, nous n’avons pas choisi, cela nous a été donné, et nous essayons de changer notre surprise en gratitude. »
Nous pouvons à présent reprendre les trois éléments dont nous avons parlé plus haut, l’amour, l’éducation, la liberté, et voir comment ils se spécifient au sein de la famille, à partir de cette donation qui nous dépasse.
Première spécificité : l’amour familial est essentiellement un amour sans préférence. Il ne relève pas du choix ni de la comparaison. Cela vaut spécialement pour la relation entre les parents et les enfants. L’amour des parents et des enfants est fondé sur la filiation elle-même et non sur des affinités électives. On le sent très bien lorsque le père est un lecteur de Tite-Live tandis que le fils se consacre aux jeux vidéos. Jamais ils n’auraient songé à se trouver dans le même salon. Jamais ils n’auraient formé ensemble un club. Mais la famille est le contraire du club électif ou sélectif. Les liens du sang y brisent les chaînes du parti tout autant que les chaînettes du caprice.
L’enfant est toujours tel que les parents ne l’auraient pas voulu, mais aussi tel qu’ils l’aiment, et donc qu’ils consentent inconditionnellement à l’accueillir. Les parents sont toujours tels que les enfants leur auraient préféré des héros de films, Charles Ingalls, par exemple, ou Yoda, mais aussi tels qu’ils les aiment, malgré tout, de cet amour constitutif, qui précéda leur propre conscience d’eux-mêmes, et donc tels qu’ils doivent inconditionnellement les honorer.
La famille, c’est toujours l’amour du vieux con et du jeune abruti, et c’est cela qui la rend si admirable, c’est cela qui en fait l’école de la charité. La charité est l’amour surnaturel du prochain, celui qu’on n’a pas choisi et qui nous est de prime abord antipathique. Or les premiers prochains que l’on n’a pas choisis, et qui nous sont souvent insupportables, ce sont nos proches.
Deuxième spécificité : dans la famille, le lien éducatif se fonde sur une autorité sans compétence. On n’attend pas d’être un bon père ou une bonne mère pour avoir un enfant. Sans quoi on attendrait toujours. La paternité vous tombe dessus, parce que le désir vous a tourné vers une femme. Quel rapport entre les deux ? La biologie y voit une continuité. Mais la phénoménologie, disons la lecture de l’expérience vécue, montre une disproportion radicale, sinon une rupture entre le désir érotique et l’accueil d’un enfant. La paternité n’est pas une anticipation. C’est la présence de l’enfant qui vous la donne, cette paternité, c’est lui qui vous en investit soudain, comme d’un costume trop grand.
On peut comprendre, s’il en va ainsi, la réticence des fabricateurs du Meilleur des mondes : « En quoi celui qui a simplement couché avec une femme serait-il habilité à élever un enfant ? En quoi sa libido bestiale lui octroie-t-elle une quelconque compétence éducative ? » Cette réticence conduit fatalement au règne des incubateurs et des pédagogues, et à la mise au rebut des véritables parents. Le père est alors remplacé par l’expert, et la famille, par la firme professionnelle.
Mais, dans la famille, il ne s’agit pas d’abord de projet d’éducation mais de réalité de la filiation. Ce n’est pas la compétence qui y fonde l’autorité. C’est l’autorité reçue, malgré ses faiblesses, qui se met par la suite en quête d’une certaine compétence, sans doute, mais qui possède aussi son efficacité propre quoique paradoxale. L’autorité sans compétence a une valeur en soi, et même une valeur sans prix. D’une part, le père y montre qu’il n’est pas le Père, avec une majuscule, qu’il est lui-même un fils, et donc qu’il doit avec son fils se tourner vers une autorité plus haute que la sienne. D’autre part, puisque son autorité ne vient pas d’une compétence, mais d’un don, le père ne peut pas faire de l’enfant sa créature, et essayer de le valoriser sur sa propre échelle de valeur : il doit l’accueillir comme un mystère. Et c’est cela l’autorité la plus profonde, qui se distingue de toute compétence fonctionnelle. Elle n’instruit pas l’enfant en vue de telle ou telle qualification particulière, elle lui manifeste le mystère de l’existence comme don reçu.
Enfin, troisième spécificité en droite ligne de celles qui précèdent : dans la famille s’exerce une liberté sans maîtrise, quelque chose, nous l’avons déjà vu, qui n’est pas la liberté d’indépendance ou de pure décision, mais une liberté de consentement à ce qui est donné. Le projet parental est vite brisé par l’aventure familiale. Car il s’agit bien d’une aventure, et non d’une projection. Toutes les tragédies antiques en témoignent, qui mettent toujours en scène des histoires de famille. Mais il y a aussi ce fait ordinaire qui appartient plutôt à la comédie selon Molière : le fils ou la fille n’ont de père et de mère que pour les quitter, fonder une autre famille, épouser un parti qui n’est souvent pas le meilleur aux yeux de leurs parents.
La famille est toujours en excès sur elle-même, non seulement par le don de la naissance, mais aussi par les alliances extérieures dont elle procède et vers lesquelles elle va. Il y a votre belle-mère et puis il y a la belle-mère de votre propre fils, il y a cette extension de proche en proche qui, d’après Aristote, constitue le village puis la Cité.
Cette liberté sans maîtrise, qui vous lance dans une aventure et même dans un drame, répond à des liens qui ne sont pas contractuels. On aimerait bien ne vivre que selon des contrats et pouvoir ajuster les rapports selon sa convenance, se dégager dès que ça sent la crise. Or, on peut changer d’associé, mais on ne peut pas changer d’enfant. Et l’on peut devenir copain avec un plus âgé que soi, mais on ne peut, sans fausseté, devenir le copain de son père. Comme la différence sexuelle empêche la fusion, la différence générationnelle interdit le nivellement. Il faut faire avec un ordre causal, une hiérarchie donnée, un patrimoine hérité, ce qui invite la liberté à s’ouvrir aux distinctions du réel, et à ne pas sombrer dans l’indifférenciation d’une prétendue toute-puissance.
Nous pouvons à présent approcher la famille dans le secret de son essence. Elle n’est pas une chose parmi d’autres, mais foyer, et non pas « foyer clos », mais foyer rayonnant. Un foyer, en peinture, n’est pas un objet qui apparaît dans une perspective, mais le point à partir duquel s’ouvre la perspective. Un foyer est aussi un feu, à savoir lumière et chaleur, et donc quelque chose qu’on n’éclaire pas avec autre chose, mais qui s’éclaire de lui-même, qui se manifeste de lui-même. Je veux dire par là que la famille, avant d’être un objet de pensée, est ce à partir de quoi nous nous sommes mis à penser. Souvent, on l’oublie, comme on oublie le sol, comme on ne voit pas ce qui nous tient et nous pousse en avant. À partir de cet oubli et de la fiction individualiste qui en découle, nous avons tendance à dissocier le logique et le généalogique. Nous posons l’homme comme individu doué de raison, et refusons de le reconnaître comme fils de ses pères. Or il est l’un avec l’autre. La tradition chrétienne nous le rappelle divinement. Pour elle, le Logos est le nom grec de la raison, mais c’est aussi le nom évangélique du Fils.
Qu’est-ce donc qu’une famille ? On peut l’envisager à partir de ce que nous avons dit : la famille est le socle charnel de l’ouverture à la transcendance. La différence sexuelle, la différence générationnelle, et la différence des ceux deux différences, nous y apprennent à nous tourner vers l’autre en tant qu’autre. C’est le lieu du don et de la réception incalculable d’une vie qui se déploie avec nous mais aussi malgré nous, et qui nous jette toujours plus avant dans le mystère d’exister.
C’est comme ce premier lieu de l’existence qu’elle est aussi lieu de résistance. Résistance à l’idéologie, à la bien-pensance, à la programmation. La famille est la communauté originelle, donnée d’abord par nature et non seulement instituée par convention. Elle offre donc toujours, par son ancrage sexuel, un contrepoint à l’artifice, et ménage un espace pour ce qu’on peut appeler une vérification.
L’homme public peut cultiver son image de façade, montrer son plus beau profil sur les réseaux sociaux, mais quel est son visage dans le privé, devant sa femme et ses enfants ? Le grand Hercule, qui a vaincu les monstres, se trouve minable devant Déjanire. Le jeune génie, qui perce sur les étalages, a honte d’être vu avec son papa et sa maman, lesquels attestent de son origine commune. La volonté de puissance est toujours contrariée par la proximité familiale. Et c’est pourquoi le totalitarisme aussi bien que le libéralisme, l’emprise technologique aussi bien que le fondamentalisme religieux, commencent toujours par mettre la famille sous tutelle, avant d’essayer de la détruire. »
Fabrice Hadjadj
Grenelle de la Famille
8 mars 2014
La Mutualité
[1]Rousseau écrit dans l’introduction de son Discours sur l’origine et les fondements de l’inégalité parmi les hommes (1754) :« Commençons donc par écarter tous les faits. » Mais, au début du Contrat Social (I, 2), il ne peut s’empêcher d’admettre le fait fondamental: « La plus ancienne de toutes les sociétés et la seule naturelle est celle de la famille. »
[2] Je pense à l’usage grec de la papponymie : « Selon cette coutume, le fait pour un homme de prénommer son fils aîné du prénom de son propre père confirme à la fois et transcende que tout parent retrouve ses propres parents à travers ses enfants. La permutation symbolique implique au minimum la succession de trois générations pour fabriquer de l’humain institué » (Pierre Legendre, Filiation, Filiation. Leçon IV, Fayard, 1990, p. 62.)
« De nouvelles réalités s’imposent à tous. L’idée qu’on fasse aujourd’hui la promotion de l’adultère dans les couloirs du métro ne touche pas qu’une strate de la population, ne touche pas que les militants de La Manif Pour Tous, ne touche pas que les premiers engagés dans la résistance qu’est LMPT, mais touche bien l’ensemble des populations. Et l’ensemble des populations, bien sûr, est très choqué par cette évolution. J’ai trente neuf ans et je dois dire que la France de mon enfance me manque. Elle me manque. Pourquoi ? Parce que c’est allé beaucoup trop vite. L’accélération de l’histoire agit de manière extrêmement pernicieuse et en très peu de temps nous avons connu le Pacs, puis le mariage maintenant « pour tous », demain très certainement la Pma et au nom de l’égalité, la Gpa. Je dis tout cela parce que je pense que nous sommes gardiens d’un patrimoine. Lorsque nous évoquons la famille il s’agit là bien d’un patrimoine. Nous sommes à Bordeaux : Bordeaux est le plus grand ensemble urbain au monde classé par l’UNESCO et tout cela est le fruit d’une bataille. Préserver un patrimoine et le transmettre intact aux générations futures est de l’ordre quasiment de l’eschatologie. Il y a une dimension chevaleresque dans le fait de prendre conscience de l’importance de ce que peut être une faune, une flore ou un ensemble urbain. Mais qu’est-ce que la famille face à une faune, une flore ou un ensemble urbain ? Bien évidemment, elle est au-delà de tout cela. Et je pense que nous sommes une génération de résistants. Je pense que aujourd’hui soit on s'engage, soit on est complice, soit on collabore. Et notre idée à La Manif Pour Tous a tenu en deux temps. Un premier temps que nous n’avons pas vraiment contrôlé. Nous avons réagi : c’est le temps des manifestations, celui où, poussés par un élan « surhumain », nous avons été des millions à nous déplacer dans les rues. C’est le premier temps qui allait très bien d’ailleurs avec la figure de notre première porte-parole, Frigide Barjot. Mais aujourd’hui nous sommes dans un second temps. Un temps plus posé, plus mûr, qui est extrêmement dangereux parce que les médias parlent moins de nous. Ce soir, Sud-Ouest a choisi de ne pas venir couvrir cet événement. Et on peut se poser la question : est-ce que parce que les médias parlent moins de nous, de notre combat, notre résistance serait-elle moins légitime ? Évidemment non. Donc, je voudrais vous dire, mais avec mon cœur, que tous les gens qui ont pris les tgv pour partir à Paris, vous y étiez certainement, dites-vous que nous avons besoin tout autant de ces gens-là dans cette deuxième partie de travail qui sera plus posé, plus lié à la réflexion, lié à la « pro-activité ». Nous allons anticiper, maintenant, car nous savons que nous avons un impact certain sur le gouvernement, sinon nous aurions déjà la PMA et plus encore. Soyons extrêmement conscients que nous sommes le plus grand mouvement populaire que la France ait porté depuis mai 68. N'en déplaise aux médias. (…)
La mobilisation continue, n'en déplaise aux médias. Nous sommes une génération charnière, ne soyons pas le maillon faible. Nous avons tous eu la chance de vivre dans une famille. Eh bien moi, personnellement, je souffre parfois d'insomnie, parce que je me dis : "Est-ce que j'ai vraiment tout fait pour que cette loi ne passe pas ?" L'idée d'imaginer un enfant qui n'a rien demandé, élevé par deux hommes ou par deux femmes, me fait terriblement mal au cœur. Le cœur ne suffit pas : au sentiment doit succéder la réflexion et à la réflexion doit succéder l'engagement, l'action. Nous avons connu comme je l’ai dit tout à l’heure une première phase, qui dépendait un peu des actions du gouvernement auxquelles nous avons réagi. Nous sommes dans une deuxième phase de réflexion. Nous devons dans cette deuxième phase absolument retrouver le maillage de toutes celles et ceux qui se sont engagé(e)s durant cette première période, sinon notre mouvement risque de se défaire, de se déliter, et nous n'aurions pas perdu qu'une bataille, mais peut-être la guerre.
Dans cet engagement, je voudrais souligner la bénédiction divine, et je pèse mes mots, d’avoir aujourd’hui comme présidente Ludovine de la Rochère. J’étais il y a deux semaines en séminaire avec elle dans une abbaye normande : nous étions 48 heures enfermés à réfléchir sur ce que seraient les prochaines étapes de LMPT. Je la connaissais finalement très mal avant ce séminaire et elle m’a beaucoup impressionné. Depuis 20 ans, j’avale des séminaires. Et je l’ai vu d’une acuité, d’une intelligence, d’une réactivité… Au moment où nous étions tous extrêmement fatigués, elle restait alerte, bienveillante. Elle porte ce mouvement comme une mère porte un enfant, véritablement. Attention à celles et ceux qui ont pensé ou qui pensent que Ludovine est une aristocrate qui, pour passer le temps de libre, se serait engagée dans une cause médiatique. Ce n’est pas ça. Ludovine c’est un moine-soldat, si je puis dire. Et véritablement c’est une bénédiction divine que de l’avoir. Je m’excuse, je sais que tu es très pudique, je m’excuse d’avoir à lui dire comme cela, mais il est terriblement important pour une troupe de savoir qu’elle est engagée avec un général, un chef qui en vaille la peine. Et Dieu sait que Ludovine est beaucoup plus que cela.
Merci de m’avoir écouté. On ne lâche rien. Ce n’est pas qu’un slogan. Véritablement, on se fait un serment en soi-même en se disant que jamais nous n’abandonnerons les combats de la famille, pour nos familles et pour la France. »