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Centralité de la personne humaine en politique : principes non-négociables ?

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Y a-t-il de la place pour la miséricorde en politique ?

         Un Jubilé de la Miséricorde… Cela s’applique-t-il aussi à la politique ? C’est la dernière question qui a été posée aux intervenants des Universités d’été de la Sainte Baume au mois d’août 2015. Une vraie question en réalité pour le chrétien dont l’engagement coïncide avec la diaconie de la politique ! En cela il répond aux nombreux appels de l’Église, comme ceux du Pape François, qui a fait de ce service non pas une option mais bien un impératif. Ce faisant, le chrétien prend rapidement conscience que les premiers à le critiquer seront précisément ceux-là même qui l’ont invité à donner de sa personne. Ils lui diront qu’il ne s’est pas engagé au bon endroit !  Ainsi, les premiers obstacles rencontrés par le chrétien novice en politique sont… les chrétiens eux-mêmes, pour qui ce monde est vraiment peuplé de gens aux convictions élastiques et à la sincérité douteuse. On a ainsi vite fait de lui démontrer l’intransigeance des uns et le laxisme des autres. Non, vraiment, impossible de les fréquenter, encore moins de travailler avec ces personnes-là !

         Et si le débat politique consiste seulement à discréditer son adversaire ou s’il se réduit à l’art de la petite phrase, on est évidemment rapidement déçu et tenté d’abandonner la place à d’autres, plus habiles à ce jeu-là.

Dialoguer plus que dénoncer

miséricorde, politique         Petit retour en arrière… Octobre 1962, ouverture du Concile Vatican II, saint Jean XXIII trace les grandes lignes de ses travaux : un concile plus pastoral que doctrinal, préoccupé de présenter la doctrine avec les mots capables de rejoindre l’homme contemporain et non de condamner les opinions erronées. L’Église « préfère recourir au remède de la miséricorde, plutôt que de brandir les armes de la sévérité. » Cette fois-ci, pas d’anathèmes ni d’excommunications, il ne s’agit pas de dresser l’inventaire des hérésies modernes, mais bien de mettre en valeur les pierres d’attente de l’Évangile présentes dans les différents courants de la culture contemporaine.

         L’intention première du Concile aurait-elle été oubliée, qui continue pourtant de constituer pour l’Église une boussole ? On n’a jamais entendu en effet autant de voix en France ces derniers temps pour dénoncer et pourfendre les options politiques des catholiques. Alors que la phrase du Pape François ne cesse d’être reprise en boucle, « qui suis-je pour juger ? », il semblerait que le domaine politique échappe encore à cette invitation. Il est plus aisé de recourir aux bons vieux Anathema sit  anté-conciliaires que de dialoguer et de permettre des échanges raisonnables. Permettez à ceux qui ont mérité cette excommunication en tentant d’organiser ce dialogue de faire quelques remarques.

Le chrétien, un divergent ?

ImageMiséricordeCarréeBlanc.jpg         Il n’est un secret pour personne que le catholique en politique est difficile à classer. On trouve des catholiques dans tous les partis français et si d’aventures on se risquait à prêcher l’ « union sacrée », on a vite fait de se voir rappeler que nous ne sommes plus au temps des croisades. Il suffit d’ailleurs qu’un parti revendique le qualificatif de chrétien pour que le catholique, qui reste français, retrouve ses ardeurs contestataires et rebelles. Les essais gallicans de démocratie chrétienne ont-ils d’ailleurs été suffisamment probants pour le lui reprocher ?

         Si la Doctrine Sociale de l’Église donne un certain nombre de principes et de critères de jugement, elle ne constitue pas en elle-même un programme politique et permet même à des options bien différentes de se réclamer d’elle. Ces principes d’humanité sont bien connus et souvent mentionnés à la veille de chaque échéance électorale. Découlant de la centralité de la personne humaine, si vous les appelez principes non-négociables, vous risquez déjà d’être catalogué.

         Quel parti peut prétendre aujourd’hui les défendre ou les bafouer tous ? La politique étant l’art du possible, l’engagement de chacun se fera en fonction de ceux auxquels il est le plus sensible, acceptant alors de côtoyer au sein d’un même parti des personnes aux convictions notablement différentes. Le principe de réalité fait que l’on est conduit à reconnaître que la politique n’est pas un absolu : salutaire prise de conscience pour éviter le risque de divinisation de ce qui doit rester de l’ordre du moyen. Cela étant posé, est-il possible de faire un pas de plus et d’affirmer sereinement que l’on rencontre des hommes de bonne volonté dans tous les camps ?

Dans le parti point de salut ?

ImageMiséricordeCarréeBleue.jpg         J’invite tous ceux qui dégainent déjà l’argument de la fausse naïveté à rentrer leur glaive et à essayer de me faire l’aumône de leur bienveillance. Je ne ferai pas la liste de toutes les positions clairement incompatibles avec l’Évangile : c’est à la fois facile et désespérant. La vérité impose de reconnaître qu’aucun parti n’est fréquentable pour un « bon chrétien », pas seulement un seul… Mais tous les socialistes sont-ils forcément idéologues, sectaires et laïcards ? Tous les Républicains sont-ils inévitablement hyper-libéraux, idolâtres de l’argent et francs-maçons ? Tous les écologistes sont-ils libertaires et révolutionnaires? Tous les membres du FN sont-ils racistes et antisémites? À l’évidence, non. Quant aux non-inscrits, sont-ils tous à mettre dans le sac des idéalistes au cœur pur ?

Il y a un curieux mélange actuellement chez les jeunes chrétiens, soucieux de cohérence entre leur foi et leur engagement politique, de défenseurs des racines chrétiennes de la France, d’écologistes intégraux anti-libéraux, de serviteurs passionnés des plus pauvres, de militants fervents pour La famille et la vie humaine, d’adversaires d’une laïcité agressive et de partisans d’une coexistence active, de missionnaires ardents et d’organisateurs de dialogues improbables… J’allais oublier ceux qui souhaitent réveiller la vieille fibre anarchiste et révolutionnaire ! On est loin des caricatures à l’emporte-pièce d’une certaine « radicalisation des catholiques ».

Miséricorde pour les politiques !

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         Est-ce que cette génération « Jean-Paul II », « Benoît XVI » ou « François » est plus utopique que les précédentes (remarquez que le Pape n’hésite pas à demander aux jeunes de « mettre le bazar ») ? Elle a au moins le mérite de prendre au sérieux l’Évangile, qui restera toujours un signe de contradiction. Aurons-nous l’honnêteté de les encourager dans leur désir de servir le bien commun sans pointer immédiatement du doigt les limites de cet exercice ? Saurons-nous respecter le sérieux de leur démarche sans les infantiliser par des accusations trop rapides ? S’il n’existe pas de « parti catholique », alors laissons ouvert le champ des possibles. N’allons pas immédiatement traiter de naïfs ceux qui rêvent d’un courant catholique social chez les socialistes ou les écolos, de supplétifs ceux qui militent chez les Républicains, d’intégristes ceux qui reprennent courageusement l’étiquette chrétienne et de fachos ceux qui croient à la possibilité d’un courant catho au FN…

         Année de la Miséricorde vous avez dit ? Ne retombons pas tout de suite dans les slogans trop faciles : pas de miséricorde pour les ennemis de la miséricorde… Et si l’on prenait cette année le risque de la miséricorde à propos de l’engagement politique ! Année 2016 : La Miséricorde Pour Tous ?

 

Logo ObservatoirSocioPolitiq.jpgLouis-Marie Guitton
Initialement publié dans l’OSP
sous le titre Miséricorde & politique
le 06/01/2016

 

 

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